Autorité des marchés financiers (Québec)

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Autorité des marchés financiers c. World Financial Group Insurance Agency of Canada Inc.

 

 

TRIBUNAL ADMINISTRATIF
DES MARCHÉS FINANCIERS

 

 

 

CANADA

 

PROVINCE DE QUÉBEC

 

MONTRÉAL

 

 

 

DOSSIER N° :

2017-033

 

 

 

DÉCISION N° :

2017-033-002

 

 

 

DATE :

Le 13 mars 2018

 

______________________________________________________________________

 

 

 

EN PRÉSENCE DE :

Me ELYSE TURGEON

______________________________________________________________________

 

 

 

 

 

AUTORITÉ DES MARCHÉS FINANCIERS

 

Partie demanderesse

 

c.

 

WORLD FINANCIAL GROUP INSURANCE AGENCY OF CANADA INC.

 

et

 

MA FLORENCE DELGADO

 

et

 

IORDAN DIMITROV IORDANOV

 

Parties intimées

 

 

 

______________________________________________________________________

 

 

 

DÉCISION

 

______________________________________________________________________

 

 

 

 

 

 

 

 

HISTORIQUE DU DOSSIER

[1]           Le 6 octobre 2017, l’Autorité des marchés financiers (l’« Autorité ») a déposé auprès du Tribunal administratif des marchés financiers (le « Tribunal ») une demande de sauvegarde pour être entendue d’urgence le 13 octobre 2017.

[2]           Cette demande vise les intimés World Financial Group Insurance Agency of Canada inc. (« WFG »), Iordan Dimitrov Iordanov ainsi que Ma Florence Delgado (« Delgado »).

[3]           L’audience avait pour but de permettre au Tribunal d’entendre de manière urgente et au mérite cette demande de l’Autorité.

[4]           Lors de l’audience du 13 octobre 2017, la procureure de l’Autorité a déposé deux ententes intervenues avec les parties intimées.

[5]           Le 13 octobre 2017, le Tribunal a pris acte des deux ententes et a prononcé les ordonnances suivantes[1] :

« ORDONNE à l’intimée World Financial Group Insurance Agency of Canada inc. et ses employés de se conformer aux engagements pris envers l’Autorité dans l’entente intervenue avec cette dernière, à savoir :

         De  procéder à la suspension immédiate de Ma Florence Delgado, cette dernière ne pouvant exercer aucune fonction auprès du cabinet, à quelque titre que ce soit;

         De ne dispenser aucune réunion d’information visant à fournir à des candidats potentiels des informations relatives à World Financial Group Insurance Agency of Canada inc. ou sur la formation requise afin que ces derniers puissent devenir représentants en assurance de personnes;

         De ne recruter quelque représentant que ce soit, ni transmettre à l’Autorité une demande de rattachement d’un représentant en assurances;

         De ne référer aucun candidat  à aucune formation spécialisée dispensée par un organisme reconnu.

[..]

ORDONNE à l’intimée Ma Florence Delgado de cesser quelque activité que ce soit, tant en épargne collective qu’en assurance de personne.

SUSPEND le certificat de représentante de Ma Florence Delgado en assurance de personnes, portant le numéro 153406.

SUSPEND l’inscription de Ma Florence Delgado à titre de représentante de courtier en épargne collective, portant le numéro 1795721.

REPORTE l’audition au mérite de la demande d’ordonnance de sauvegarde de l’Autorité au 8 décembre 2017, à 9 h 30.

La présente ordonnance de sauvegarde prend effet immédiatement et cessera d’avoir effet lors du jugement au mérite à intervenir sur la demande de sauvegarde de l’Autorité des marchés financiers dans la présente instance. »

AUDIENCE

[6]           L’audience au mérite sur la demande d’ordonnance de sauvegarde pendant la durée de l’enquête a eu lieu comme prévu le 8 décembre 2017, en présence des procureures de l’Autorité, du procureur des intimés WFG et Iordan Dimitrov Iordanov ainsi que du procureur de l’intimée Delgado, lequel était accompagné d’une stagiaire en droit.

[7]            Selon la procédure déposée au Tribunal, l’enquête de l’Autorité est toujours en cours, ainsi l’Autorité a indiqué qu’elle se réservait, suivant cette enquête, le droit de déposer une autre procédure administrative visant l’un ou l’autre des intimés, ou toute autre personne visée par son enquête.

[8]           La procureure de l’Autorité a d’abord indiqué au Tribunal qu’une entente était intervenue avec les intimés WFG et Iordan Dimitrov Iordanov.

[9]           Selon cette entente, les termes de l’entente intervenue en octobre 2017 sont reconduits pendant la durée de l’enquête de l’Autorité.

[10]        L’Autorité s’est dite satisfaite du plan d’action que ces deux intimés lui ont soumis pour la durée de l’enquête.

[11]        Quant aux intimés WFG et Iordanov, leur procureur s’estime également satisfait des termes de l’entente qui doit être en vigueur pour la durée de l’enquête en soulignant, par ailleurs, que selon les conclusions à intervenir lors de l’audition du même jour concernant l’intimée Delgado, il serait opportun que chaque partie puisse présenter un avis de présentation pour en modifier les termes si les circonstances militaient en faveur d’un changement de l’entente.

[12]        Le Tribunal a indiqué être en accord avec les termes de l’entente et que jugement suivrait sur la question.

[13]        En conséquence, le présent jugement comporte des conclusions qui prennent acte de cette entente pendant la durée de l’enquête de l’Autorité, à l’exception de son paragraphe 2 a, et ce, en raison des conclusions du présent jugement qui lèvent la suspension de l’inscription et du certificat de l’intimée Delgado.

[14]        Ainsi, en raison de l’entente intervenue, la suite de l’audition du 8 décembre 2017 ne visait que la contestation de l’intimée Delgado pour la durée de l’enquête.

[15]        Lors de l’audition le Tribunal a prononcé la mise sous scellé des pièces D-8, D-9, D-10, D-11, D-12 et la version non caviardée de la pièce D-13 à la demande de l’Autorité, afin de préserver la confidentialité des questions des examens de l’Autorité et des informations qu’elles contiennent, lesquelles restent accessibles aux parties et à leurs procureurs respectifs.

[16]        Lors de l’audition, l’Autorité s’est engagée envers le procureur de l’intimée à lui transmettre certains documents qu’il avait demandés, mais à un moment au cours de l’audience ce dernier a renoncé à toutes ses objections prises sous réserve par le Tribunal et à toutes ses demandes d’engagement relatives à ces documents.  

[17]        Lors de l’audition, la procureure de l’Autorité a fait témoigner deux témoins de l’Autorité soit l’enquêteuse au dossier et la Directrice de la qualification de l’Autorité.

[18]        Suite à la contre-preuve du procureur de l’intimée Delgado qui a fait entendre deux témoins en plus de sa cliente, les parties ont fait leurs représentations au Tribunal.

CONTEXTE

Les parties

[19]        Dans le présent dossier, les parties impliquées sont les suivantes :

-       L’Autorité des marchés financiers

[20]        L’Autorité est l’organisme chargé notamment de l’administration de la Loi sur la distribution de produits et services financiers[2] et exerce à cet effet les fonctions qui y sont prévues conformément à l’article 7 de la Loi sur l’Autorité des marchés financiers[3].

-       World Financial Group

[21]        World Financial Group Insurance Agency of Canada inc. est une personne morale légalement constituée en vertu de la Loi sur les sociétés par actions, L.R.O., c. B.16, depuis le 30 décembre 1991[4]. Elle est immatriculée au registre des entreprises du Québec depuis le 15 novembre 1996.

[22]        L’activité économique de WFG est « Agences d’assurances » et « Sale of life and accident and sickness insurance »[5].

[23]        WFG est inscrite auprès de l’Autorité à titre de cabinet dans la discipline de l’assurance de personnes, tel qu’il appert de l’attestation de droit de pratique[6] qui la concerne.

[24]        Le cabinet WFG compte plusieurs succursales au Québec dont une sise au 5160, rue Décarie, suite 430 à Montréal (Québec), H3X 2H9 (« succursale Décarie »)[7].

[25]        Au moment de l’audience, 241 représentants sont rattachés auprès de WFG au Québec, toutes succursales confondues[8].

[26]        La succursale Décarie compte environ 15 à 20 représentants.

[27]        Pour la période du 20 mai 2015 au 15 juin 2017, le poste de dirigeant responsable était occupé par Karl Netten[9].

[28]        Depuis le 15 juin 2017, Iordan Dimitrov Iordanov agit à titre de dirigeant responsable pour le cabinet WFG[10].

-       Ma Florence Delgado

[29]        L’intimée Delgado est certifiée auprès de l’Autorité dans la discipline de l’assurance de personnes[11]. Elle était rattachée à la succursale Décarie de WFG du 29 septembre 2005 jusqu’à la date de la décision du présent Tribunal du 13 octobre 2017[12], en plus d’y occuper le poste de directrice et d’y être responsable de la formation.

[30]        L’intimée Delgado détenait également une inscription à titre de représentante de courtier en épargne collective et a agi pour le compte de WFG jusqu’au 13 octobre 2017, date de la suspension son inscription.

[31]        Dans le présent dossier, l’Autorité allègue qu’il y aurait en place, à la succursale Décarie du cabinet intimé WFG, un stratagème de tricherie aux examens du Programme de qualification en assurance de personnes (ci-après « PQAP »).

[32]        Selon l’Autorité, l’intimée Delgado serait impliquée dans ce stratagème de tricherie y ayant elle-même contribué, tout en étant dirigeante du cabinet et désignée responsable de la formation. Ainsi elle aurait manqué à ses obligations au sens de la Loi.

[33]        L’audience et la présente décision ne portent que sur l’implication alléguée de l’intimée Delgado dans un tel stratagème de tricherie.

PREUVE

Preuve de l’Autorité

        Témoignage de la directrice de la qualification

[34]         La première témoin entendue a été la Directrice de la qualification de l’Autorité, laquelle gère, avec son équipe, l’entrée en carrière des futurs représentants en assurance. Elle développe les outils de qualification de l’Autorité tout en gérant l’administration des examens de qualification à l’Autorité.

[35]        Afin d’éclairer le Tribunal, elle a donné des détails et explications sur le programme PQAP qui permet la qualification des futurs représentants en assurance de personnes.

[36]        Elle a indiqué que ce programme s’applique dans tout le Canada. Il s’agit d’une formation, d’un curriculum commun et d’examens de certification uniformes dans toutes les provinces du pays.

[37]        Les premiers examens en marge de ce programme ont été administrés en janvier 2016.

[38]        Ce programme s’applique aux représentants en assurance de personnes, en assurance maladie ou accident et en assurance collective de personnes.

[39]        L’objectif derrière le programme est de bien former les candidats de manière à ce qu’ils en ressortent compétents et aptes à bien servir et protéger le public.

[40]        En ce qui a trait à la formation, il existe une liste de prestataires reconnus par l’Autorité et les futurs représentants n’ont qu’à s’inscrire auprès l’un de ces prestataires.

[41]        Une fois que l’inscription du candidat est déclarée dans le registre de formation qu’elle appelle le RCPA, soit le registre canadien des participants en assurance, la formation peut avoir lieu. 

[42]        En l’instance WFG n’est pas un prestataire reconnu par l’Autorité pour la formation des futurs représentants. Par ailleurs, la firme Oliver’s Learning, dont il est fait mention dans le présent dossier, est un prestataire reconnu au Québec ainsi que dans d’autres provinces.

[43]        De plus, WFG retient les services de cette firme pour la formation de ses futurs représentants.

[44]        Le curriculum obligatoire de la formation se compose de quatre modules : déontologie, assurance-vie, assurance contre la maladie et les accidents ainsi que fonds distincts et rentes.

[45]        Le programme PQAP a créé du matériel didactique standardisé pour chacun des modules que les futurs représentants doivent étudier.

[46]        Chaque prestataire peut bonifier le matériel de base inclus dans le programme avec des outils pédagogiques supplémentaires de son choix.  

[47]        Le prestataire Oliver’s Learning a créé un programme de formation en ligne.

[48]        Chez Oliver’s Learning, pour se préparer aux examens, les futurs représentants peuvent accéder à un site web et faire leur formation en ligne à leur rythme.

[49]        Une fois la formation terminée, le prestataire doit certifier que le futur  représentant a complété et a réussi sa formation et à cette fin, il administre un examen qui clôt la formation.

[50]        La Directrice de la qualification a indiqué que les prestataires n’ont pas à soumettre leurs examens à l’Autorité pour approbation.

[51]        Lorsque la personne réussit l’examen du prestataire, elle s’adresse alors à l’Autorité en soumettant une demande pour s’inscrire aux examens administrés par l’Autorité et elle dispose alors d’un délai d’une année pour réussir ces examens.

[52]        L’Autorité administre à ses locaux quatre examens écrits à choix multiples et il existe trois versions d’examens pour chacun des modules à être évalué.

[53]          Après avoir réussi les quatre examens, les futurs représentants doivent faire une période probatoire auprès d’un cabinet, laquelle dure de six à douze semaines selon leur discipline. Ils sont alors supervisés par d’autres représentants du cabinet.

[54]         La Directrice de la qualification de l’Autorité a relaté avoir entendu parler de WFG la première fois vers la mi-juillet 2017.

[55]        En effet, à ce moment, elle aurait été informée qu’un individu avait communiqué avec le Centre d’information de l’Autorité pour dénoncer l’existence d’un stratagème de tricherie eu égard aux examens du prestataire Oliver’s Learning qui avaient lieu à la succursale Décarie de WFG, ainsi qu’eu égard aux examens administrés par l’Autorité.

[56]        Elle aurait par la suite reçu copie de la documentation qui a été remise à l’Autorité par ce plaignant pour étayer la dénonciation et l’a comparée avec les examens actuellement en cours à l’Autorité.

[57]        Elle a constaté qu’il y avait des similitudes préoccupantes avec les examens qui sont administrés par l’Autorité, notamment dans la formulation des questions et réponses lesquelles, selon ses dires, ne pouvaient pas être le résultat du hasard.

[58]        De plus, elle a également constaté que malgré que les questions d’examen de l’Autorité soient actualisées de temps à autre, la documentation remise pour étude présentait aussi des similitudes préoccupantes avec des questions qui existaient dans des versions antérieures d’examens de l’Autorité.

[59]        Devant ce constat, la Directrice de la qualification a alors transféré le dossier au département des enquêtes de l’Autorité afin que ces faits soient approfondis.

[60]        Elle a également indiqué que les examens de certification de l’Autorité sont confidentiels, mais que l’Autorité et les régulateurs des autres provinces canadiennes mettent en ligne quelques exemples de questions pour aider les candidats à se préparer aux examens, lesquelles sont distinctes des questions des examens administrés.

        Témoignage de l’enquêteuse de l’Autorité

[61]        La deuxième témoin entendue dans cette affaire est l’enquêteuse de l’Autorité, laquelle a été impliquée à ce dossier depuis le 8 septembre 2017.

[62]        Les démarches préliminaires de son enquête lui ont permis de rencontrer deux témoins relativement à cette affaire et par la suite, elle a discuté avec environ quatorze autres témoins, a fait environ dix entrevues téléphoniques et a aussi fait des demandes d’information auprès de WFG et d’un assureur du nom d’Ivari.

[63]        Selon ses dires, WFG aurait un modèle d’affaires de type « marketing réseau » comportant différents niveaux selon lesquels les représentants peuvent passer d’« associate » à « marketing director » à « senior marketing director ».

[64]        Selon le modèle d’affaires de WFG, pour passer d’un niveau à l’autre un représentant doit recruter d’autres représentants en assurance et plus il recrute de représentants, plus il peut monter dans la hiérarchie.

[65]        Aussi, plus un représentant monte dans la hiérarchie plus le niveau de commissionnement qu’il reçoit s’élève lorsque des produits sont vendus par celui-ci.

[66]        Au début, un associé recevrait une commission de 26 % du montant de la prime d’assurance vendue.

[67]        Si celui-ci recrute cinq représentants, ses commissions augmenteraient à 52 % du montant des primes vendues et il deviendra alors « marketing director ».

[68]        S’il est promu « senior marketing director » son taux de commission avoisinerait les 75 % de la prime vendue pour environ une dizaine de représentants inscrits sous son niveau. 

[69]        Ainsi, l’objectif serait pour les représentants de recruter le plus de personnes possibles et que ces personnes obtiennent leur certificat en assurance le plus rapidement possible afin de bénéficier d’une plus grande commission sur les produits vendus.

[70]        Selon son témoignage, le recrutement se fait beaucoup auprès d’amis et de proches des représentants.

[71]        On inviterait des gens à participer à des présentations deux fois semaines et parfois le samedi matin.

[72]        Selon les informations qu’elle a obtenues, peu ou pas de formation serait offerte lors de ces rencontres. Par ailleurs, la possibilité de faire beaucoup d’argent serait miroitée aux participants. On y parlerait également d’éducation financière.

[73]        Si, lors de ces rencontres une personne manifeste de l’intérêt, elle sera alors invitée à s’inscrire à WFG et sera ainsi autorisée à venir à d’autres rencontres où il y aura principalement des présentations sur certains produits financiers, mais elle précise qu’il lui a été rapporté, par les témoins rencontrés, qu’aucune véritable formation sur le cursus n’était dispensée lors de ces rencontres.

[74]        Les candidats intéressés à devenir représentants doivent ensuite s’inscrire auprès d’un prestataire de formation en ligne et dans ce cas-ci, c’est avec le prestataire Oliver’s Learning qu’ils se sont inscrits.

[75]        Les futurs représentants doivent alors faire leur formation par eux-mêmes.

[76]        L’enquêteuse a témoigné à l’effet que les trois premiers témoins à qui elle a parlé lui ont mentionné qu’il n’était pas nécessaire d’étudier, qu’on les incitait à passer rapidement les examens d’Oliver’s Learning en ligne et dans les trois cas, il leur était fourni par WFG des documents de questions-réponses avant les examens.

[77]        Lors de la séance d’examen à la succursale Décarie, les candidats seraient seuls ou plusieurs dans une salle avec une caméra qui les filme et les enregistre.

[78]        Par contre, l’un des ordinateurs à l’avant serait branché sur un projecteur qui projetterait sur le mur les questions de l’examen au fur et à mesure.

[79]        Des représentants inscrits, dont madame Delgado, auraient accompagné les trois postulants dans la salle et leur auraient offert un support en soufflant les réponses d’examen aux postulants à mesure que les questions étaient projetées sur le mur devant eux.

[80]        Le témoin1 a remis à l’enquêteuse un document illustrant les questions-réponses pour les fins de la préparation aux examens[13].

[81]        Il lui a également remis copie d’une projection d’une question d’examen sur le mur de la salle prise en photo pendant l’examen[14].

[82]        Une fois que les examens de certification sont faits, il y aurait de la pression sur le futur représentant afin qu’il passe rapidement les examens de l’Autorité.

[83]        Le témoin 1 a remis à l’enquêteuse un document de questions-réponses qui circulait dans la succursale de Décarie intitulé « AMF », lequel serait utilisé pour la préparation de l’examen de l’Autorité[15].

[84]        Certains témoins lui ont dit qu’il y aurait parfois des séances de formation la veille de l’examen de l’Autorité pour en faciliter le passage.

[85]        Un témoin a également rapporté à l’enquêteuse qu’on lui avait demandé de se souvenir d’une ou deux questions de l’examen de l’Autorité et les rapporter afin d’aider les futurs étudiants à passer cet examen.

[86]        L’enquêteuse a consigné le résumé de ses rencontres avec ces trois témoins auxquels il est fait référence plus haut dans un document qu’elle a déposé en preuve. Le témoin 1 lui aurait relaté ce qui suit[16] :

-       Il connait Delgado depuis une dizaine d’années puisqu’elle est une amie de sa femme;

-       En 2016, il a participé à des réunions deux fois semaine à la succursale de Décarie de WFG et en août 2016, il s’est inscrit au PQAP afin d’obtenir son certificat de représentant en assurance de personnes;

-       La formation était dispensée par Oliver’s Learning et il devait faire l’examen à distance via une plateforme en ligne comportant des tests et examens de pratique sur le site;

-       Selon lui, aucune formation n’est donnée à la succursale de Décarie et il n’y a pas d’encouragement à le faire puisque l’objectif est de se qualifier le plus rapidement possible aux examens de qualification;

-       Pour accélérer le processus, une banque de questions et réponses à l’examen d’Oliver’s Learning est fournie par la succursale Décarie[17] pour les fins de l’examen en ligne;

-       Les réponses d’examen sont également enregistrées dans le téléphone cellulaire de Jaime Tuazon, le mari de l’intimée Delgado;

-       Lors de l’examen à la succursale Décarie, l’intimée Delgado ou un membre de son équipe branche un ordinateur à un projecteur afin de projeter les réponses à l’examen sur un écran, tel que le démontre la photo qu’il a prise et remise à l’Autorité;

-       Selon lui, l’intimée Delgado ou le membre de son équipe doit faire attention de ne pas être vu, puisque l’examen est filmé et enregistré;

-       Au printemps 2017, afin de lui permettre de passer l’examen de l’Autorité, l’intimée Delgado a remis à lui et d’autres étudiants un document afin de l’aider, lequel contient les questions et réponses à l’examen. Il a remis ce document à l’Autorité[18];

-       L’intimée Delgado expliquerait aux candidats qu’ils n’ont qu’à apprendre les questions et réponses par cœur pour réussir l’examen de qualification;

-       Elle leur demande également de retenir une question lors de l’examen afin de bonifier sa base de données;

-       Après avoir été inscrit, on lui demande de ne vendre qu’un seul produit d’assurance qui est une police d’assurance-vie universelle de la compagnie Ivari à tout le monde, indépendamment de la situation de la personne et de ne pas de se donner la peine d’offrir d’autres produits, car ce produit était adapté à toute la clientèle. 

[87]        L’enquêteuse a témoigné à l’effet que le témoin 2 lui a relaté notamment ce qui suit[19] :

-       Elle a connu WFG par l’entremise de son ami le témoin 1;

-       Entre les mois de mars et juin 2017, elle a assisté aux réunions d’information
données deux fois par semaine par la succursale Décarie;

-       Elle s’est également inscrite au Registre canadien des participants en assurance afin de compléter la formation spécialisée dispensée par Oliver’s Learning;

-       Vers la fin du mois de mai 2017, soit moins d’un mois après son inscription, elle a passé l’examen d’Oliver’s Learning via la plateforme en ligne;

-       Pour ce faire, l’intimée Delgado lui a fourni un document contenant les questions et les réponses à l’examen;

-       Au moment de passer l’examen, elle était assise dans une salle en face de l’intimée Delgado, chacune avec son ordinateur. Madame ayant accès à une banque de données sur son ordinateur;

-       Les questions étaient projetées sur un grand écran pendant que Delgado et elle-même cherchaient les réponses dans le document remis préalablement par l’intimée Delgado;

-       L’intimée Delgado lui soufflait la réponse ou l’écrivait sur un papier sans faire de bruit, puisque l’examen était filmé et enregistré;

-       L’examen a duré environ trois heures, puisque l’intimée Delgado ne connaissait pas toutes les réponses;

-       Malgré l’aide de l’intimée Delgado, elle a échoué le chapitre assurance contre la maladie ou les accidents, qu’elle a repris quelques jours plus tard, toujours avec l’assistance de l’intimée Delgado;

-       Elle a très peu étudié, puisque l’intimée Delgado lui a dit qu’on l’aiderait pour cette étape;

-       C’est l’intimée Delgado qui lui a dit de procéder de cette manière et qui l’a aidée à passer l’examen d’Oliver’s Learning;

-       L’intimée Delgado lui a dit que personne ne devait savoir qu’elle l’avait aidée;

-       Pour compléter sa certification, l’intimée Delgado lui a demandé de passer rapidement les quatre examens de qualification auprès de l’Autorité, même si elle ne se sentait pas prête;

-       Elle a finalement décidé d’abandonner, parce qu’elle ne se sentait pas prête à passer cet examen. 

[88]        L’enquêteuse a témoigné à l’effet que le témoin 3 lui a relaté par entrevue téléphonique notamment ce qui suit[20] :

-       Au début du mois de décembre 2016, le témoin 1 l’a référé à WFG;

-       Ce témoin est francophone et ne parle pas ou très peu l’anglais;

-       Il a accepté de s’inscrire auprès de WFG et de suivre le PQAP bien que le
programme offert soit en anglais, puisque l’intimée Delgado lui a représenté que la formation se donnerait en français dans deux ou trois mois;

-       Entre temps, il a commencé l’étude en vue des examens, mais l’intimée Delgado trouvait cependant que le processus était long et lui a demandé de
passer les examens en anglais au lieu d’en français;

-       Il a passé l’examen d’Oliver’s Learning en anglais, entre trois semaines ou un mois après son inscription à WFG, quelqu’un étant alors à côté de lui durant l’examen pour lui souffler les réponses;

-       Lui était seul à passer l’examen dans une salle avec son accompagnateur et un groupe passait le même examen dans une autre salle;

-       Madame Delgado était présente et se promenait d’une salle à l’autre pour voir comment cela se passait;

-       Il a réussi son examen malgré qu’il soit incapable de soutenir une conversation en anglais, mais a finalement abandonné pour la suite. 

[89]        Selon l’enquêteuse, le taux de réussite de WFG aux examens de l’Autorité serait significativement supérieur au taux de réussite national.

[90]        L’enquêteuse a également relaté au Tribunal avoir rencontré approximativement quatorze témoins dans l’enquête et que de ces quatorze témoins, outre les trois témoins dont le témoignage est relaté ci-haut, deux ou trois autres lui auraient confirmé le même stratagème et exactement la même manière de procéder.

[91]        Ces deux ou trois autres témoins lui auraient tous relaté que l’intimée Delgado leur disait qu’ils n’avaient pas besoin d’étudier et qu’il y avait des personnes présentes dans la salle d’examen qui projetaient les réponses au mur et qui aidaient les futurs représentants lors des examens d’Oliver’s Learning.

[92]        L’enquêteuse a également relaté que ces gens lui ont fait part de la pression qu’ils recevaient pour recruter des candidats potentiels ainsi que sur la vente de produits universels.

[93]        Selon ce qui lui a été dit par ces deux ou trois personnes qui ont été inscrites et rattachées à la succursale Décarie de WFG, les nouvelles recrues se font offrir de souscrire elles-mêmes à un produit d’assurance-vie universelle et d’en vendre par la suite.

[94]        Cependant, l’enquêteuse a relaté avoir communiqué avec 10 à 12 autres personnes qui ont nié catégoriquement avoir participé à un quelconque stratagème de tricherie.

[95]        Elle a indiqué avoir fait un blitz pour ceux qui ont abandonné et aucun d’eux n’a parlé de tricherie, mais plusieurs lui ont confirmé avoir abandonné en raison du recrutement massif qui est exigé et parce qu’il n’y avait pas de réelle volonté de créer une clientèle d’assurance, car cette volonté se dirigeait vers le recrutement de représentants potentiels, vu les incitatifs reliés au recrutement.  

[96]        L’enquêteuse a également communiqué avec certains autres régulateurs du pays, dont le Insurance Council of British Columbia et le Financial Services Commission of Ontario, lesquels lui ont mentionné être préoccupés par des stratagèmes similaires peut-être en place chez WFG pour les examens d’Oliver’s Learning et les examens administrés par ces deux régulateurs provinciaux.

[97]        Selon l’enquêteuse, beaucoup de démarches sont encore à faire et l’enquête suit son cours.

[98]        En contre-interrogatoire, le procureur de l’intimée a mis en évidence que l’enquêteuse ignorait quel type de relation existait entre les témoins 1 et 2 et l’intimée Delgado et que les 10 à 12 témoins qui ont nié avoir participé à un stratagème de tricherie ont également nié que l’intimée Delgado avait participé.

[99]        L’enquêteuse ne savait pas si le témoin 1 et le témoin 2 se sont parlé ou non avant sa rencontre avec eux.

[100]     L’enquêteuse a également indiqué avoir des doutes sur les témoignages qu’elle a reçus de certaines de ces 10 à 12 personnes qui ont nié avoir constaté un stratagème de tricherie, puisque certaines de ces personnes ont passé leurs examens en même temps que d’autres qui lui ont affirmé qu’il y avait eu tricherie avec un projecteur et des réponses soufflées.  

[101]     Vu ces incohérences, elle a indiqué qu’il était justifié de poursuivre l’enquête pour faire la lumière sur cette situation.

[102]     L’enquêteuse a également témoigné que le témoin 1 travaillait présentement pour un autre cabinet.

[103]     Elle  a également affirmé ne pas savoir quel support l’intimée Delgado apportait au programme qui se faisait en ligne, mais qu’il était possible pour une personne de seulement suivre la formation en ligne sans aucune autre formation additionnelle et de compléter le programme. Elle a ajouté que certains futurs candidats procédaient ainsi.

[104]     L’enquêteuse a aussi affirmé que le prestataire Oliver’s Learning filme les candidats au moment de l’examen, mais qu’il existait aussi d’autres prestataires de formation reconnus qui ne filmaient pas les candidats lorsqu’ils passaient l’examen.

Preuve de l’intimée

[105]     En contre-preuve, le procureur de l’intimée Delgado a fait entendre deux  témoins ainsi que l’intimée Delgado.

        Témoignage de B.M.

[106]     La preuve de l’intimée a débuté par le témoignage de la témoin B.M., qui est une représentante en assurance rattachée au cabinet WFG depuis les trois dernières années. Elle a expliqué au Tribunal ses démarches et son cheminement pour obtenir sa certification en assurance.

[107]     La témoin B.M. a indiqué avoir toujours été intéressée par une certification en assurance de personnes elle s’est inscrite au programme de PQAP via la succursale de Décarie de WFG.

[108]     Elle allait à la bibliothèque de l’Université Mc Gill pour étudier la matière.  

[109]     Elle a suivi les formations en ligne d’Oliver’s Learning et a ensuite passé son examen à la succursale de Décarie de WFG.

[110]     Lors de l’examen, elle était seule dans une salle avec un ordinateur une caméra pointée vers elle pour la durée de l’examen. Au début de l’examen, une photo d’elle a été prise.

[111]     Personne ne l’a aidée ou ne lui a soufflé les réponses et elle n’a jamais triché.

[112]     Elle a beaucoup étudié pour ses examens, plusieurs jours par semaine à la bibliothèque.

[113]     Elle a assisté à plusieurs rencontres à la succursale de Décarie ou elle apprenait sur les produits.

[114]     Elle a ensuite fait les examens à l’Autorité des marchés financiers et a réussi en 2016.

[115]     Selon elle, WFG n’est pas un support à l’étude, la réussite ne dépend que de l’individu qui doit lire et étudier le matériel en ligne. Les gens de WFG sont par ailleurs disponibles si les futurs candidats ont des questions.

[116]     Elle connait l’intimée Delgado et elle n’a pas connaissance des faits que l’Autorité allègue à l’encontre de celle-ci et c’est la première fois qu’on lui pose ces questions.

[117]     Elle est présentement une  «training associate 1st level» au sein de WFG.

[118]     La témoin B.M. est une dame d’un certain âge. Elle s’exprimait bien et malgré qu’elle démontrait une certaine nervosité lors de son témoignage, le Tribunal l’a jugée crédible.

        Témoignage de J.L.A.

[119]     Le procureur de l’intimée a ensuite appelé à la barre le témoin J.L.A., lequel est un représentant en assurance-vie chez WFG depuis février 2016.

[120]     Avant d’immigrer au Canada, il était conseiller en assurances aux Philippines.

[121]     Il s’est inscrit en ligne au PQAP en 2015. Il a étudié la matière par lui-même à la bibliothèque à raison de deux à trois heures par jour pour un certain temps.

[122]     Dans son étude, s’il y avait quelque chose à clarifier, les gens de WFG répondaient aux questions.

[123]     Il a fait son examen de certification à la maison dans sa salle à dîner et non aux bureaux de WFG.

[124]     À la succursale de Décarie, il y a des rencontres les mardis et jeudis où il y a des gens qui y parlent de nouveaux produits. Le samedi matin, il y a des séances de formation continue.

[125]     Il connait l’intimée Delgado depuis 12 ans et n’a jamais questionné son intégrité et son leadership.

[126]     À la question du procureur de l’intimée, il a indiqué qu’il n’a pas parlé de son témoignage à qui que ce soit, qu’il n’a pas été préparé pour son témoignage d’aucune manière, qu’il n’avait jamais vu le procureur de l’intimée avant son témoignage du jour et même qu’en fait, il ne savait pas pourquoi il avait été convoqué à témoigner devant le Tribunal.

[127]     Le témoin J.L.A. est un homme d’âge moyen. Il était posé et affirmé. Il répondait clairement aux questions qui lui étaient posées et le Tribunal a jugé qu’il s’agissait d’un témoin crédible.

        Témoignage de l’intimée Delgado

[128]     Ensuite le procureur de l’intimée Delgado a fait entendre sa cliente. Cette dernière a indiqué ce qui suit au Tribunal :

[129]     Elle est conseillère en sécurité financière depuis 2002. Elle a commencé à s’impliquer avec WFG en septembre 2005. Elle détient également des inscriptions de non-résident en Alberta et en Nouvelle-Écosse et a des équipes dans ces deux provinces.

[130]     Suite au changement de programme du PQAP en 2015, elle aurait recommandé chez WFG que les futurs représentants fassent leur formation avec Oliver’s Learning en raison du fait qu’il y avait des caméras aux examens.

[131]     Selon elle, ce procédé était plus sérieux que les autres centres de formation à distance qui ne filmaient pas les examens.

[132]     Elle insiste sur le fait que s’il n’y avait pas de caméra les gens pourraient faire des choses incorrectes (« crazy things ») et elle veut que les candidats potentiels prennent au sérieux le processus.

[133]     Elle précise qu’il y a peut-être une vingtaine de prestataires autorisés par l’Autorité pour la formation, mais que très peu avaient un processus d’examen avec caméra comme Oliver’s Learning.

[134]     Questionnée à savoir si elle connaissait les témoins 1, 2 et 3, elle a indiqué que le témoin 1 (Éric) était le petit ami de l’une de ses anciennes clientes.

[135]     Quant à la témoin 2 (Melissa), elle est l’amie d’Éric, le témoin 3 est aussi l’un de leurs amis.

[136]     Elle a aussi indiqué que chez WFG, il y avait deux séances de formation par semaine lors desquelles ils travaillent à partir de livres de l’Autorité et que le samedi matin ils travaillent sur des exemples de situations.

[137]     Le jeudi, WFG invite des représentants de diverses compagnies qui présentent des formations sur des produits d’assurance et le mardi soir est le soir de formation pour les représentants inscrits.

[138]     Les futurs représentants sont appelés à lire trois fois chacun des livres de l’Autorité et WFG fait le suivi avec eux.

[139]     Certains étudiants font leur formation par eux-mêmes et d’autres viennent étudier aux bureaux de WFG. Elle indique qu’ils ont deux bureaux disponibles pour les étudiants qui veulent y étudier, car certains préfèrent venir au bureau au lieu d’aller à la bibliothèque.

[140]     Lors des examens qui ont lieu aux bureaux de WFG, on peut voir le candidat qui fait son examen dans la salle d’examen au travers d’une vitre.

[141]     Le tout commence par une prise de photo du candidat et ensuite l’examen est filmé et le candidat est seul dans la salle.

[142]     Elle indique que le postulant pourrait aussi faire son examen de la maison s’il le désire ou aussi à la bibliothèque et que rien ne l’oblige à venir en succursale.

[143]     Elle indique que la plupart du temps, elle n’est pas présente aux examens puisqu’elle voyage beaucoup pour son emploi.

[144]     En ce qui a trait au témoin 1, elle indique qu’il travaillait pour une autre compagnie au moment où il a effectué sa formation et qu’il ne lui avait pas divulgué cette information lorsqu’il s’est inscrit auprès de WFG, alors qu’il aurait dû le faire.

[145]     Lorsqu’elle l’a su, elle lui aurait demandé de divulguer le fait qu’il occupait un autre emploi que celui de WFG, puisqu’un représentant a l’obligation de faire une telle divulgation.

[146]     Il aurait refusé de se conformer et lui aurait alors remis son avis de démission de 30 jours.

[147]     Depuis septembre 2016, le témoin 1 tente de recruter les représentants de l’intimée chez WFG pour les attirer auprès de cette autre compagnie.

[148]     Selon elle, le témoin 1 a tenté par la suite de transférer à une autre succursale de WFG. Elle indique qu’il aurait falsifié son numéro d’assurance sociale pour tenter de transférer, parce que normalement il faut attendre 9 mois pour un tel mouvement de personnel. Elle mentionne que par la suite il lui aurait transmis une lettre et lui aurait dit qu’il était désolé.

[149]     Elle pense que c’est lui qui a fait la plainte à son égard. 

[150]     Elle indique également que la témoin 2 est l’amie du témoin 1 et qu’en ce qui a trait au témoin 3, il est aussi leur ami et est effectivement francophone, mais elle indique qu’il y a des gens qui parlent français à son bureau et qu’il aurait pu faire l’examen en français.

[151]     À la question de son procureur, elle a indiqué ne jamais avoir donné les réponses d’examen aux étudiants, ne pas avoir triché et a nié avoir fait quelque chose qui n’était pas bien et ne jamais avoir vu personne qui le faisait chez WFG.

[152]     Elle indique que pour réussir l’examen de l’Autorité, il faut vraiment étudier.

[153]     Selon ses dires, depuis 2015, à peu près vingt personnes à la succursale Décarie ont passé leurs examens et environ quatorze autres ont échoué deux ou trois fois.

[154]     En contre-interrogatoire, elle a indiqué avoir un rôle de supervision chez WFG auprès d’approximativement 20 à 30 personnes.

[155]     Elle est inscrite dans d’autres provinces canadiennes et dans ces autres provinces, il y a un représentant local qui supervise les gens, mais elle demeure responsable d’approximativement 20 représentants inscrits.

[156]     L’intimée Delgado est une femme d’âge moyen. Elle se présente bien. Elle a répondu avec clarté aux questions qui lui étaient adressées. Le Tribunal n’a pas noté de contradictions dans son témoignage ou d’incertitudes ni de signes de nervosité ou de malaise.

Représentations de la procureure de l’Autorité

[157]     Lors de ses représentations, la procureure de l’Autorité a fait valoir qu’elle demandait au Tribunal une ordonnance de sauvegarde dans l’intérêt public et que le maintien de la suspension de l’intimée pendant l’enquête était nécessaire pour la protection des investisseurs.

[158]     À cet effet, elle a invoqué les articles 93 et 94 de la Loi sur l’Autorité des marchés financiers[21] ainsi que l’article 115 de la Loi sur la distribution de produits et de services financiers[22].

[159]     De son avis, les critères à appliquer pour l’obtention d’une ordonnance de sauvegarde s’apparentent à ceux d’une injonction interlocutoire pour laquelle il faut démontrer l’apparence de droit, le préjudice sérieux et irréparable et la balance des inconvénients[23].

[160]     Elle indique que la Loi sur la distribution de produits et services financiers est une loi d’ordre public de protection qui doit être interprétée de façon libérale de manière à assurer l’accomplissement de son objet, soit l’intégrité des marchés financiers et la protection du public[24].

[161]     De plus, les articles 13 et 14 du Règlement relatif à la délivrance et au renouvellement du certificat de représentant[25] prévoient que toute personne désirant obtenir un certificat de l’Autorité dans la discipline de l’assurance de personnes ou l’assurance collective de personnes doit préalablement suivre et réussir une formation auprès d’un organisme reconnu par l’Autorité.

[162]     Cette formation vise à assurer que toute personne qui accède à la profession a les compétences requises pour bien conseiller les consommateurs.

[163]     Dans le présent dossier, la procureure de l’Autorité plaide qu’en l’espèce,  les premiers développements de l’enquête en cours démontrent la mise en
place d’un stratagème de tricherie aux examens de qualification en assurance de
personnes, dont l’une des instigatrices à ce stratagème serait Ma Florence Delgado.

[164]     Selon elle, entre cinq et six personnes ont confirmé à l’enquêteuse qu’il existait un stratagème de tricherie aux examens à la succursale Décarie.

[165]     L’Autorité soumet que les faits suivants sont particulièrement préoccupants dans le présent dossier :

        Le modèle d’affaire de WFG basé sur une structure de marketing de réseau, incitant les représentants du cabinet à en solliciter de nouveaux, afin d’obtenir de meilleures commissions sur les ventes réalisées par ces derniers;

        La formation offerte par WFG aux nouveaux représentants effectuée à distance uniquement, à même les locaux de WFG;

        La mise en place d’un stratagème de tricherie aux examens confirmé par
plusieurs témoins contactés à ce jour dans le cadre de l’enquête;

        La réussite de l’examen d’Oliver’s Learning en anglais par un témoin unilingue francophone;

        Le taux de réussite élevé des candidats supervisés par l’intimée Delgado, et ce, en l’absence de toute formation;

        L’analyse effectuée par la Direction de la qualification de l’Autorité qui confirme le plagiat des questions et réponses de l’examen de qualification;

        L’affirmation d’un témoin à l’effet que les représentants de la succursale Décarie ne vendent qu’un seul produit;

        Les informations à l’effet que la situation découverte auprès de la succursale Décarie soit répandue auprès d’autres succursales de WFG, et ce, même dans d’autres provinces canadiennes;

        Rien dans la contre-preuve présentée par l’intimée n’explique le fait qu’un des témoins ait obtenu et eu entre ses mains les documents qui comportent les questions d’examens à l’Autorité;

        On peut voir à même la première page de la pièce D-9 que cette pièce a circulé auprès de plusieurs personnes, dont la sœur de Madame Delgado.   

[166]     Ceci ferait en sorte que la protection du public et la confiance du public dans les marchés financiers sont mises en péril et qu’en participant activement à la mise en place et en supervisant le stratagème de tricherie, l’intimée Delgado a fait passer son intérêt personnel avant celui de tout client ou client éventuel.

[167]     De tels actes seraient contraires aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers[26], 3 et 19 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière[27].

[168]     Pour terminer, elle a indiqué que de son avis la probité et l’intégrité de l’intimée Delgado, des qualités essentielles à l’exercice de ses activités de représentante et à l’accomplissement de ses tâches de directrice de succursale, sont grandement affectées par les faits découverts à ce jour.

[169]     Elle conclut que le fardeau de preuve prima facie que l’Autorité doit démontrer a été rencontré et pour cette raison elle demande que soit émise l’ordonnance demandée de suspendre le certificat de l’intimée Delgado jusqu’à ce que l’enquête soit terminée.

[170]     Le Tribunal a questionné la procureure de l’Autorité pour recueillir ses commentaires sur la possibilité d’assortir de conditions l’inscription de l’intimée Delgado. Cette dernière a indiqué qu’une telle conclusion pourrait être accordée subsidiairement à ses demandes initiales, mais qu’à son avis, puisqu’il s’agit d’une question de probité cette possibilité n’était pas envisagée.

Représentations du procureur de l’intimée Delgado

[171]     Le procureur de l’intimée a quant à lui indiqué que sa consœur aurait certainement eu raison si ce n’était du fait qu’elle n’a pas réussi à prouver ses allégations.  

[172]     De son avis, il y avait une obligation de l’Autorité de faire témoigner les témoins 1,2 et 3 devant le Tribunal, alors qu’elle savait que l’intimée Delgado contestait les allégations alléguées contre elle.

[173]      Dans le présent cas, non seulement le témoignage de sa cliente, l’intimée Delgado, est totalement contradictoire avec ce que les témoins 1, 2 et 3 ont indiqué à l’enquêteuse, mais également les motifs qui ont poussé les témoins 1 et 2 à faire ces déclarations ont été démontrés au Tribunal.

[174]     En procédant de la sorte et en ne faisant pas témoigner les témoins 1, 2 et 3 on aurait nié le droit de sa cliente à contre-interroger ces derniers.

[175]     De son avis, le permis de sa cliente a été suspendu jusqu’à ce jour sans que sa cliente n’ait jamais pu même parler à un enquêteur de l’Autorité pour faire part de sa version des faits.

[176]     Il a souligné le fait que plus de 10 personnes ont nié que l’intimée Delgado aurait triché ou participé à un stratagème de tricherie et l’ont mentionné à l’enquêteuse de l’Autorité. Il a questionné les raisons de l’absence des témoins 1, 2 et 3 devant le Tribunal.

[177]     De son avis, sur 20 personnes interrogées plus de 10 ont dit qu’il n’y avait pas de tricherie et pour celles qui l’ont alléguée, elles n’étaient pas présentes à l’audition et n’ont pas témoigné.

[178]     De son avis, il est illogique de poursuivre la suspension de l’inscription de l’intimée Delgado. L’intimée a témoigné sous serment à l’effet qu’elle n’avait pas participé à ce stratagème et elle a indiqué que les gens qui l’ont dénoncée ont un intérêt personnel dans cette dénonciation.

[179]     Dès la première occasion, sa cliente s’est présentée devant le Tribunal et a témoigné de sa version. Or, les témoins 1,2 et 3 ont été entendu par ouï-dire et n’ont pu être contre-interrogés et leur témoignage a seulement été rapporté.

[180]     De son avis, procéder de la sorte équivaudrait à un renversement du fardeau de la preuve où il appartiendrait à sa cliente de démontrer qu’elle n’a pas fait quelque chose de répréhensible.

[181]     Selon lui, il est important de se rappeler que WFG a choisi de faire les examens avec vidéo alors qu’ils auraient pu faire autrement.

[182]     Le procureur de l’intimée a soutenu que l’intérêt public n’est pas menacé en l’instance. Il souligne que l’enquête peut continuer et que peut-être une preuve supplémentaire pourra être amenée éventuellement.

[183]     Pour l’instant, ce qui a été démontré devant le Tribunal est insuffisant et sa cliente devrait pouvoir continuer de gagner sa vie.

[184]     À la question du Tribunal sur la possibilité d’assortir de conditions l’inscription de l’intimée Delgado, le procureur de l’intimée a reconnu que le Tribunal disposait d’un tel pouvoir, cependant il a indiqué qu’il craignait que l’imposition de telles conditions lui nuise dans son emploi ou teinte sa réputation, ce qui pourrait avoir un impact permanent dans toute organisation.

Représentations du procureur de l’intimée WFG

[185]     Pour sa part, le procureur de l’intimée WFG a indiqué au Tribunal que dans ses allégations, l’Autorité évoque certaines préoccupations eu égard au modèle d’affaires de l’intimée WFG. Or, ce dernier mentionne que nulle part dans les procédures il n’est indiqué que ce modèle contreviendrait de quelque manière que ce soit à la règlementation. Dans les circonstances, il appelle à la prudence eu égard à ce qui pourrait être indiqué ou inféré à ce sujet.

 

 

LE DROIT

[186]     Dans le présent dossier et eu égard à l’intimé Delgado, l’Autorité demande au Tribunal de maintenir les ordonnances qu’il a prononcées suite à une entente à l’encontre l’intimée le 13 octobre 2017, et ce, pour la durée de l’enquête de l’Autorité.

[187]     Il s’agit d’ordonnances de suspension du certificat et de l’inscription de l’intimée Delgado et d’interdiction d’exercer toute activité que ce soit tant en épargne collective qu’en assurance de personnes.

-       Mission et fonctions de l’Autorité au sens de la loi

[188]     Pour rendre les ordonnances demandées, le Tribunal doit tenir compte de la mission et des fonctions de l’Autorité, lesquelles sont prévues aux articles 4 et 8 de la Loi sur l’Autorité des marchés financiers et qui se lisent comme suit :

«4. L’Autorité a pour mission de:

[…]

3°  assurer l’encadrement des activités de distribution de produits et services financiers en administrant en outre les règles d’admissibilité et d’exercice de ces activités et en prenant toute mesure prévue à la loi à ces fins;

8. L’Autorité exerce ses fonctions et pouvoirs de manière:

1°  à favoriser la confiance des personnes et des entreprises à l’égard des institutions financières et autres intervenants du secteur financier quant à leur solvabilité et à l’égard de la compétence des agents, des conseillers, des courtiers, des représentants et des autres intervenants qui œuvrent dans le secteur financier;

2°  à promouvoir une offre de produits et services financiers de haute qualité et à un prix concurrentiel pour l’ensemble des personnes et des entreprises dans toutes les régions du Québec;

[…]

5°  à assurer la protection du public contre les pratiques déloyales, abusives et frauduleuses et à donner accès aux personnes et aux entreprises lésées à divers modes de règlement de différends.

                                                                                  (nos soulignements)

[189]     Dans son appréciation, le Tribunal tient également compte de l’objet de la Loi. À cet égard, la décision de la Cour du Québec dans l’affaire Marston[28] exprime bien cet aspect des choses ainsi que la mission conférée à l’Autorité en vertu de la Loi :

« [42]  Le législateur a confié à «L'AMF» une mission que le Tribunal qualifierait de "chien de garde" en lui confiant le devoir de "prêter assistance aux consommateurs de produits et services financiers", de veiller à ce que les institutions financières respectent certaines normes de solvabilité, d'assurer l'encadrement des activités de distribution de produits et services financiers, d'assurer l'encadrement des activités de bourse, de voir à la mise en place de programmes de protection et d'indemnisation des consommateurs.

[43]            Puis,  la «LDPSF», en son article 184 a confié aussi à «L'AMF» la "mission" spécifique de veiller à la protection du public en voyant à l'application de cette Loi. »

[190]     Le but de la Loi sur la distribution des produits et services financiers est, sans contredit, la protection du public.  Elle est une Loi dite de protection qui commande une interprétation large et libérale. Tel qu’il l’a été mentionné dans la décision Pezim[29] de la Cour suprême du Canada :

"[…]les lois sur les valeurs mobilières visent avant tout à protéger le public investisseur.  Dans l'arrêt Brosseau c. Alberta Securities Commission, 1989 CanLII 121 (CSC), [1989] 1 R.C.S. 301 (Brosseau), notre Cour a reconnu l'importance de cet objectif lorsqu'il faut procéder à l'examen de décisions prises par des commissions des valeurs mobilières; le juge L'Heureux-Dubé, s'exprimant au nom de notre Cour, dit, à la p. 314:

D'une manière générale, on peut dire que les lois sur les valeurs mobilières visent à réglementer le marché et à protéger le public.   Cette Cour a reconnu ce rôle dans l'arrêt Gregory & Co. V. Quebec Securities Commission, 1961 CanLII 75 (SCC), [1961] R.C.S. 584, dans lequel le juge Fauteux a fait remarquer à la p. 588:

[TRADUCTION] L'objet prépondérant de la loi est d'assurer que les personnes qui, dans la province, exercent le commerce des valeurs mobilières ou qui agissent comme conseillers en placement, sont honnêtes et de bonne réputation et, ainsi, de protéger le public, dans la province par des personnes qui y exercent ce commerce.

                                                                                  (Références omises)

                                                                                  (Nos soulignés)

[191]     Vu ce qui précède, le Tribunal doit tenir compte de ces principes d’interprétation de la loi dans son appréciation, le tout en lien avec les objets de la loi tels que précités.

-       Rôle du Tribunal et fardeau de preuve.

[192]     Dans le présent dossier, il est demandé au Tribunal de rendre des  ordonnances en vertu des articles 93 et 94 de la Loi sur l’Autorité des marchés financiers[30] et de l’article 115 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers[31]. De plus, dans l’exercice de la discrétion qui lui est conférée le Tribunal rend de telles ordonnances dans l’intérêt public.

[193]     L’article 115 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers[32] se lit comme suit :

« 115. Le Tribunal administratif des marchés financiers, après l’établissement de faits portés à sa connaissance qui démontrent qu’un cabinet, qu’un de ses administrateurs ou dirigeants, ou qu’un représentant a, par son acte ou son omission, contrevenu ou aidé à l’accomplissement d’une contravention à une disposition de la présente loi ou de ses règlements, ou que la protection du public l’exige, peut, à l’égard du cabinet ou du représentant, selon le cas, radier ou révoquer, suspendre ou assortir de restrictions ou de conditions son inscription ou son certificat. Le Tribunal peut également, dans tous les cas, imposer une pénalité administrative pour un montant quoi ne peut excéder 2 000 000 $ pour chaque contravention. »                                                                                                                                                                                 (Nos soulignés)

[194]     Ainsi, le fardeau de l’Autorité est de démontrer au Tribunal que l’intimée a, par son acte ou son omission, contrevenu ou aidé à l’accomplissement d’une contravention à une disposition de la présente loi ou de ses règlements ou que la protection du public l’exige.

[195]     Selon l’article 81 du Règlement sur les règles de procédure du Tribunal administratif des marchés financiers[33], le Tribunal est assujetti à la règle de la prépondérance de preuve.

[196]     Cependant au niveau des mesures conservatoires, tel que demandé dans le présent dossier, le Tribunal rappelle comme il l’a mentionné dans l’affaire Baazov[34] :

« [80] L’audience de novo est une audience où toutes les parties ont l’occasion pour la première fois d’entendre la preuve de l’Autorité, de la contester et de faire valoir toute preuve ou argumentation à son encontre afin d’éclairer le Tribunal sur l’ensemble des faits lui permettant d’évaluer si les ordonnances de type conservatoire émises de manière ex parte sont justifiées ou non, dans l’intérêt public par prépondérance de preuve.

[81] Le Tribunal rappelle qu’il n’y a pas lieu, au stade des mesures conservatoires, de conclure d’une manière définitive que des manquements ou actes contraires à l’intérêt public ont été ou non commis par les intimés et/ou les mis en cause, ni de déterminer si des moyens de défense à l’égard de ces manquements et actes sont recevables ou non. »

[197]     Contrairement à l’affaire Baazov, la présente audience ne suit pas une audience ex parte rendue de manière urgente par le Tribunal, mais plutôt une ordonnance intérimaire rendue par le Tribunal suite à deux ententes intervenues entre les parties.

[198]     Or tout comme dans le cas d’une audience de contestation qui fait suite à une décision ex parte, le fardeau de preuve auquel est assujettie l’Autorité dans le présent dossier est le même que celui évoqué dans l’affaire Baazov. En effet, il n’y a pas lieu de conclure de manière définitive que des manquements ou actes contraires à l’intérêt public ont été ou non commis par l’intimée.

[199]     L’ordonnance demandée, si rendue à ce stade, vaudra pendant l’enquête de l’Autorité et c’est suite à cette enquête qu’il pourra être statué définitivement sur les manquements, si l’Autorité décide d’aller de l’avant.

[200]     Or, malgré qu’il ne sera statué que plus tard de manière définitive si des manquements ont eu lieu, il n’en demeure pas moins qu’une preuve prépondérante et probante doit être faite par l’Autorité sur ces allégations.

[201]     À ce stade des procédures, le Tribunal doit se questionner à savoir si, sur la base de la preuve soumise par prépondérance, l’intérêt public risque d’être compromis si l’intimée Delgado continue d’exercer ses activités.

[202]     Si la réponse est positive, le Tribunal maintiendra la suspension et les ordonnances déjà prononcées à son égard et lèvera la suspension et ces ordonnances dans la situation inverse.

[203]     De plus, l’article 75 du Règlement sur les règles de procédure du Tribunal administratif des marchés financiers[35] stipule que le Tribunal n’est pas tenu de suivre les règles ordinaires de la preuve en matière civile et l’article 80 de ces mêmes règles indique que le ouï-dire est recevable devant le Tribunal, si cette preuve offre des garanties raisonnables de crédibilité, et ce, sous réserve des règles de justice naturelle.

-       Les manquements à la loi reprochés 

[204]     Dans la présente affaire, l’intimée Delgado est une personne certifiée en matière d’assurance de personnes et est également inscrite à titre de représentante en assurance et en épargne collective, et ce, en vertu de la Loi sur la distribution de produits et services financiers[36].   

[205]     Or, ce qui est reproché ici à l’intimée c’est d’avoir, à titre de de personne inscrite ou certifiée et de directrice, responsable de la formation chez WFG :

        participé activement à un stratagème de tricherie aux examens d’entrée en carrière de représentants  de WFG et de l’avoir supervisé, ayant ainsi manqué d’intégrité, de probité et d’honnêteté;

        d’avoir fait passer ses intérêts personnels avant ceux de ses clients;

        de ne pas avoir veillé à ce que ses employés respectent les dispositions de la loi.

[206]       En effet, en vertu de son inscription, l’intimée est tenue à certains devoirs et obligations, qui sont notamment ceux décrits aux articles suivants :

        L’article 11 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière[37] lequel se lit comme suit :

« 11. Le représentant doit exercer ses activités avec intégrité. »

        L’article 19 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière[38] lequel se lit comme suit :

« 19. Le représentant doit subordonner son intérêt personnel à celui de son client et de tout client éventuel. […] »

        L’article 3 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière[39] lequel se lit comme suit :

« 3. Le représentant doit veiller à ce que ses employés ou mandataires respectent les dispositions du présent règlement de même que celles de la Loi sur la distribution de produits et services financiers ( chapitre D-9.2 ) et celles de ses règlements d’application. »

ANALYSE

[207]     En prenant en considération les paramètres et les dispositions de droit applicables mentionnés ci-haut, le Tribunal a procédé à l’analyse de la preuve qui lui a été présentée.

[208]     La question à analyser par le Tribunal et qui se dégage des représentations qui lui ont été faites est la suivante, à savoir :

Est-ce que l’Autorité a démontré au Tribunal par prépondérance de preuve la participation de l’intimée à un stratagème de tricherie justifiant la suspension de son inscription et de son certificat pendant la durée de l’enquête ?  

[209]      Pour les fins du présent dossier, le Tribunal doit concentrer son analyse sur ce qui a été démontré en preuve en ce qui a trait à l’intimée Delgado.

[210]     Ceci étant dû au fait que l’audition relative à la contestation de WFG eu égard aux mêmes faits est remise à plus tard et que dans l’intervalle l’entente intervenue entre l’Autorité et WFG prévaudra.

[211]     Eu égard à l’intimée Delgado, la preuve de l’Autorité a consisté du témoignage de la Directrice de la qualification et de l’enquêteuse au dossier.

[212]     Le Tribunal n’a entendu aucun autre témoin pour l’Autorité, puisque l’enquêteuse a relaté verbalement ses entretiens avec les témoins 1 et 2 et 3[40], lesquels font état de  l’existence d’un stratagème de tricherie à la succursale de Décarie de WFG.

[213]     L’enquêteuse a également relaté le contenu des entrevues téléphoniques entretenues auprès d’autres personnes qui ont passé au travers du processus d’examen menant à l’examen d’Oliver’s Learning et ultimement à une certification de l’Autorité.

[214]     Par ailleurs, elle indique que plus d’une dizaine personnes entretenues en entrevue téléphonique ont nié l’existence d’un stratagème de tricherie aux examens.

[215]     Selon elle, les entrevues tenues auprès de deux ou trois autres personnes lui auraient aussi confirmé l’existence d’un stratagème de tricherie chez WFG, mais peu de détails ont été donnés sur le  contenu de ces entrevues lors de l’audience.

[216]     En surplus de cette preuve testimoniale, l’Autorité a déposé une preuve documentaire, soit, un échange de courriels comportant des questions et réponses[41] d’examen, une photo de réponses d’examen sauvegardées dans un téléphone[42], une photo prise d’une salle d’examen à l’occasion d’une séance d’examen[43] et copie d’un document comportant des questions et réponses d’examen avec les lettres AMF indiqués de manière manuscrite sur l’entête du document[44].

[217]     Du côté de l’intimée, le Tribunal a entendu le témoignage de l’intimée qui nie avoir participé à un stratagème de tricherie et de deux témoins qui ont passé leurs examens auprès de WFG et qui témoignent sur le processus qui les a amenés à être qualifiés en assurance de personnes, sans qu’il n’y ait eu de tricherie.

[218]     Le Tribunal constate qu’il y a contradiction entre le témoignage de l’intimée Delgado et les propos de l’enquêteuse de l’Autorité en ce qui a trait son implication dans un stratagème de tricherie.

[219]     Tel que mentionné précédemment, le fardeau de preuve qui doit être appliqué par le Tribunal est la prépondérance de preuve. Ceci veut dire qu’en cas de contradiction des témoignages, le fardeau de preuve que l’Autorité doit supporter doit comporter un tel degré de conviction que le Tribunal retienne cette version et écarte la version de l’intimée comme étant non digne de foi.

[220]     À ce sujet, la décision Osman c. Collège des médecins[45] traite ainsi de la question en matière disciplinaire :

 

« […]

Il n'y a pas lieu de créer une nouvelle charge de preuve. Il importe toutefois de rappeler que la prépondérance, aussi appelée balance des probabilités, comporte des exigences indéniables. Pour que le syndic s'acquitte de son fardeau, il ne suffit pas que sa théorie soit probablement plus plausible que celle du professionnel. Il faut que la version des faits offerts par ses témoins comporte un tel degré de conviction que le Comité le retient et écarte celle de l'intimé parce que non digne de foi.

Si le Comité ne sait pas qui croire, il doit rejeter la plainte, le poursuivant n'ayant pas présenté une preuve plus persuasive que l'intimé. Il ne suffit pas que le Comité préfère la théorie du plaignant par sympathie pour ses témoins ou par dégoût envers les gestes reprochés au professionnel. Il est essentiel que la preuve à charge comporte un degré de persuasion suffisant pour entraîner l'adhésion du décideur et le rejet de la théorie de l'intimé.

La prépondérance de preuve n'est pas une sinécure pour les Comités de discipline. Elle n'est pas affaire de préférence émotive, mais bien d'analyse rigoureuse de la preuve. Elle impose au syndic un fardeau exigeant et une preuve de qualité, faute de quoi il se verra débouté purement et simplement. »

[221]     Dans le présent cas, le Tribunal doit composer avec le témoignage de l’intimée Delgado et des témoins B.M. et J.L.A. lors de l’audience versus le témoignage de la Directrice de la qualification de l’Autorité sur le programme PQAP et son analyse des documents soumis en preuve par l’enquêteuse et la preuve par ouï-dire présentée par l’enquêteuse de l’Autorité.

[222]     Aucun autre témoin n’a été présenté à l’audience par l’Autorité relativement aux faits allégués pour ajouter à la preuve.

[223]     L’intimée Delgado a témoigné avec aplomb devant le Tribunal. Son témoignage s’est fait sous serment.

[224]     Elle a témoigné, dans un premier temps, sur ses qualifications professionnelles puisqu’elle exerce depuis de nombreuses années dans ce domaine après avoir fait des études universitaires à Singapour.

[225]     Elle a commencé comme simple associé chez WFG et maintenant plusieurs représentants au Québec et ailleurs  travaillent pour elle, qui est maintenant directrice du marketing et responsable de la formation.

[226]     Son témoignage a mis l’emphase sur le fait qu’il était important pour elle que les candidats soient filmés lors de leurs examens et du support qu’elle leur apportait, si ces derniers le lui demandaient pendant leur formation.

[227]     Elle a témoigné sur la formation qu’elle organisait pour eux quelques fois par semaine et sur le support qu’elle leur apportait.

[228]     Elle a relaté le déroulement habituel des séances d’examen d’Oliver’s Learning qui se passaient à la succursale de WFG et a indiqué qu’elle assistait rarement à ses séances puisqu’elle voyageait beaucoup dans son emploi.  

[229]     L’intimée Delgado a nié avoir participé à quelque stratagème de tricherie que ce soit et a indiqué que le témoin 1 pouvait avoir un intérêt personnel à sa suspension.

[230]     En effet, selon ses dires, le témoin 1 avait un emploi ailleurs que chez WFG et tentait de s’approprier les représentants qui travaillaient pour elle pour les amener chez un compétiteur.

[231]     Selon elle, les témoins 2 et 3 sont les amis du témoin 1 et n’ont pas poursuivi leur processus de qualification. Elle indique également que le témoin 1 lui aurait dit qu’il était désolé.

[232]     Quant aux témoins B.M. et J.L.A. appelés par le procureur de l’intimée, ces derniers ont aussi témoigné sous serment qu’ils avaient passé au travers leur processus de qualification à la succursale Décarie de WFG et qu’il n’y avait pas eu de tricherie lors de leurs examens qu’ils ont passé seuls, qu’ils ont suivi le processus d’Oliver’s Learning et que l’intimée était disponible s’il y avait des questions.  

[233]     À première vue, le Tribunal n’a pas noté d’hésitations ou de contradictions dans le témoignage de l’intimée qui permettraient de douter de son témoignage outre les contradictions avec les propos des témoins 1, 2 et 3 relatés par l’enquêteuse.

[234]     Or, quelles sont ces contradictions? Pour en arriver à cette détermination, le Tribunal a apprécié chacune des déclarations que l’enquêteuse de l’Autorité a soumises en preuve des témoins 1, 2 et 3 en lien avec l’intimée Delgado.

-       Le témoin 1

[235]     En lien avec l’intimé Delgado, le témoin 1 indique :

-       Qu’elle n’offre pas d’autre formation que celle d’Oliver’s Learning;

-       Que lors des examens d’Oliver’s Learning à la succursale Décarie, l’intimée Delgado ou un membre de son équipe branche un ordinateur à un projecteur afin de projeter les réponses à l’examen sur un écran et que ces personnes doivent faire attention pour ne pas être vus puisque l’examen est filmé;

-       Qu’une banque de questions-réponses à l’examen d’Oliver’s Learning est fournie à la succursale Décarie et que le mari de l’intimée Delgado a les réponses aux questions d’examen dans son téléphone cellulaire;

-       Que pour les examens de qualification passés à l’Autorité, l’intimée Delgado lui aurait remis des questions-réponses afin de l’aider[46] ou d’aider d’autres étudiants et que ce document contient les questions-réponses de l’examen;

-       Que l’intimée Delgado suggère aux postulants d’apprendre par cœur les questions et réponses et demande à ceux qui passent les examens de retenir une question-réponse afin de bonifier sa base de données.

[236]      À la lecture de ce qui précède, le Tribunal constate que les seuls aspects où il peut relier directement l’intimée Delgado à un stratagème de tricherie est dans la remise du document questions-réponses pour l’examen de l’Autorité, et dans sa demande aux postulants de retenir des questions d’examen.

[237]     Pour ce qui est de l’accompagnement aux examens, le résumé de l’enquêteuse indique qu’elle ou un représentant assiste à l’examen. Pour le Tribunal la nuance est importante, est-ce elle ou quelqu’un d’autre qui souffle ces réponses ? Or, le témoin n’était pas présent pour le dire.

[238]     Le Tribunal a ensuite examiné le document[47] questions-réponses que l’intimée Delgado aurait remis au témoin 1 et il s’agit d’un modèle d’examen à choix multiples avec des choix de réponses ou la réponse a été identifiée à certains endroits.

[239]     Dans ce document, on constate à de nombreux endroits des notes manuscrites en marge des réponses identifiées où apparaissent des indications qui dirigent l’étudiant vers le chapitre du manuel où la matière est expliquée ou vers la notion à étudier, à titre d’exemple : « see chapter 3, shortened life, page 83 », « chapter 6, p173 », « chapter 1, page 44 », etc.  

[240]     Relativement à ce document, la Directrice de qualification de l’Autorité a témoigné à l’effet que les questions et réponses que l’on trouvait à ce document comportaient des similarités troublantes avec les questions et réponses des examens qu’elle administre.

[241]     Cependant, elle a également ajouté qu’il y avait trois différents examens pour chacun des modules lors des examens de l’Autorité et que de temps à autre les questions d’examen changeaient.

[242]     De l’avis du Tribunal, ceci limite l’impact que peuvent avoir ces documents sur les résultats d’examens.

[243]     Le Tribunal ignore si d’un examen à l’autre l’Autorité inverse des choix de réponses ou modifie les données financières soumises pour les études de cas, mais si tel était le cas, les risques de tricheries en seraient d’autant plus limités.

[244]     De l’avis du Tribunal la méthode d’étude qui consiste à réviser des modèles d’examens ou des anciens examens et d’apprendre les réponses peut aussi constituer en soi une méthode comme une autre d’assimiler la matière.

[245]     La Directrice de la qualification a même indiqué que l’Autorité indiquait sur le site web de l’Autorité quelques exemples de questions aux examens.

[246]     Les annotations présentes sur le document portent le Tribunal à croire que ce document se veut plus être une aide à la préparation à l’examen qu’un stratagème en soi.

[247]     Peut-être ce document est-il trop aidant ou trop concordant avec les examens de l’Autorité, peut-être est-il trop précis au goût de l’Autorité, mais il n’en demeure pas moins que le Tribunal ne peut affirmer sur la base de la preuve qui lui a été présentée que l’utilisation de ce document constitue un plagiat qu’une personne n’a qu’à mémoriser pour l’examen.

[248]     Par ailleurs, le Tribunal n’a pu constater l’ampleur des similarités entre les questions-réponses soumises et ce document, puisque les examens auxquels ils ressemblent n’ont pas été produits en preuve, donc il s’en remet au témoignage de la Directrice de la qualification à l’effet que ces similarités sont troublantes et peuvent difficilement résulter du hasard.

[249]     Quant aux questions-réponses et les réponses soumises aux participants par le mari de l’intimée Delgado pour les examens d’Oliver’s Learning, la Directrice de la qualification a indiqué ne pas avoir fait cette correspondance, puisque l’Autorité ne révise pas les examens des prestataires reconnus.

[250]     Le Tribunal se dit tout de même surpris de la photo provenant du téléphone du mari de l’intimée Delgado qui illustre les lettres des choix de réponses aux côtés des numéros de questions dites pour l’examen d’Oliver’s Learning comme si l’institut administrait statiquement toujours le même examen avec les choix de réponses dans le même ordre[48].

[251]     Or, sur le haut de la photo apparaissent les mots «referral quiz» ou «rehearsal quiz». Les mots en question sont difficiles à lire et en l’absence d’un témoin pour donner des explications, le Tribunal peut difficilement tirer des conclusions claires sur l’utilisation faite de cette information par une personne.

[252]     S’agit-il de l’examen officiel ou d’un test de pratique? Le témoin 1 aurait mentionné à l’enquêteuse qu’on parle ici de l’examen, mais le Tribunal n’a pu lui-même évaluer ce témoignage alors que celui de l’intimée est à l’effet contraire.

[253]      Par ailleurs, s’il s’agit des réponses à l’examen de certification d’Olivers Learning, de l’avis du Tribunal et sans banaliser la tricherie, il semble qu’un minimum de mesures devrait être pris par un prestataire reconnu qui se respecte pour éviter la possibilité d’un plagiat aussi facile, mais là n’est pas le sujet de la présente instance.

[254]     Le témoin 1 aurait également soumis à l’enquêteuse une photo qu’il dirait être une photo d’une projection d’une question d’examen prise dans la salle d’examen pendant un examen[49].

[255]     Or, il n’est fait aucune mention de la date à laquelle cette photo aurait été prise, lors de quel examen, qui a pris la photo et qui était présent lors de cette séance. De plus, le cadre de la photo est tellement foncé qu’il est difficile de dire s’il s’agit d’une photo d’un écran d’ordinateur dans un environnement sombre ou bien d’une photo d’un écran projetée sur un mur. Dans ces circonstances, alors il est difficile pour le Tribunal de tirer des conclusions claires eu égard à cette pièce.

[256]     Pour ce qui est des déclarations de l’intimée Delgado que le témoin 1 a rapportées concernant sa demande de retenir les questions d’examen pour alimenter sa base de données, le Tribunal émet certaines réserves à les prendre pour acquises en raison de ce qu’il mentionne plus loin quant à la fiabilité et la force probante de ces déclarations.

-       La témoin 2

[257]     En lien avec l’intimée Delgado, la témoin 2 indique que Delgado lui aurait remis un document comportant les questions et les réponses pour l’examen d’Oliver’s Learning.

[258]     Elle indique qu’au moment de l’examen, l’intimée Delgado était assise en face d’elle chacune avec son ordinateur, que les questions étaient projetées sur un grand écran placé au mur pendant que les deux cherchaient les réponses d’examen.

[259]     Elle a ajouté que l’examen a duré trois heures parce que l’intimée Delgado ne connaissait pas les réponses, que l’intimée Delgado lui aurait dit de ne pas dire à personne qu’elle l’avait aidée et qu’elle a échoué un chapitre qu’elle a repassé quelques jours plus tard avec l’aide de l’intimée.

[260]     De l’avis du Tribunal là où on franchit la ligne entre une méthode d’étude discutable et la tricherie c’est lorsqu’on pousse la note et qu’on projette les questions d’examen sur le mur de la salle d’examen lors de celui-ci alors que des personnes en autorité sont présentes dans la salle et soufflent les réponses de l’examen aux candidats.

[261]     Le Tribunal considère ces faits comme étant troublants et inquiétants eu égard à l’intimée Delgado. Cependant, ce qui le trouble plus encore et amène un doute eu égard à la déclaration de ce témoin, c’est le fait que malgré l’aide de l’intimée Delgado qui donnait les réponses, c’est que la témoin 2 aurait échoué un examen passé dans de telles circonstances et qu’à deux il leur aurait pris trois heures pour passer l’examen.

[262]     D’autant plus que selon ce que l’enquêteuse rapporte, elle aurait assisté deux fois semaines de mai à juin aux séances d’information chez WFG.

[263]     Pour ce qui est des déclarations de l’intimée Delgado que ce témoin a rapportées sur le fait qu’il n’était pas nécessaire d’étudier ou de ne pas dire qu’elle l’avait aidée, le Tribunal émet certaines réserves à les prendre pour acquis en raison de ce qu’il mentionne plus loin quant à la fiabilité et la force probante de ces déclarations.

-       Le témoin 3

[264]     Il aurait mentionné à l’enquêteuse que quelqu’un était à ses côtés quand il a passé l’examen d’Oliver’s Learning, mais il n’identifie pas cette personne. Il a indiqué que Delgado lui aurait demandé de passer ses examens en anglais malgré qu’il ne connaisse pas cette langue. Il a dit également qu’au moment de l’examen, l’intimée Delgado alternait d’une salle à l’autre à l’occasion des examens d’Oliver’s Learning à la succursale Décarie.

[265]     Relativement à ce témoin et comme les deux autres, pour ce qui est des déclarations de l’intimée Delgado que ce témoin a rapportées le Tribunal émet certaines réserves à les prendre pour acquis en raison de ce qu’il mentionne plus loin quant à la fiabilité et la force probante de ces déclarations.

-       Les autres témoins

[266]     L’enquêteuse a témoigné à l’effet que deux à trois autres témoins lui auraient confirmé l’existence d’un stratagème de tricherie aux examens à la succursale Décarie de WFG, mais rien dans son témoignage ne fait état du rôle joué par l’intimée Delgado dans ce stratagème et rien n’indique que ces déclarations auraient été faites sous serment.

[267]     D’un autre côté, le Tribunal doit aussi tenir compte du fait que l’enquêteuse a mentionné qu’environ 10 autres personnes lui ont affirmé le contraire à l’effet qu’ils n’avaient pas triché à leurs examens à la succursale Décarie de WFG.

-       La preuve documentaire

[268]     Outre la pièce D-12 que le témoin 1 relie à l’intimée Delgado, aucune autre pièce soumise au Tribunal n’a de lien avec l’intimée Delgado directement.

[269]     Les questions-réponses transmises au témoin 1 pour l’examen d’Oliver’s Learning[50] ont été transmises par le mari de l’intimée et la photo des réponses à l’examen d’Oliver’s Learning sur un téléphone[51] est une photo qui proviendrait du téléphone du mari de l’intimée.

[270]     Mais tel que le Tribunal le mentionne précédemment dans cette décision, la mention « referral quiz » ou « rehearsal  quiz» qui apparaît au haut de cette photo demeure inexpliquée et peut être certainement lourde de sens s’il ne s’agissait que de réponses à un test de pratique.

[271]     Cette preuve présentée par l’Autorité est inquiétante, mais insuffisante pour convaincre le Tribunal à la présence d’un stratagème de tricherie aux examens d’Oliver’s Learning chez WFG, mais cette preuve ne peut être reliée à l’intimée Delgado, puisque c’est son mari qui aurait envoyé cette liste[52] et la photo[53] est celle du téléphone du mari.

[272]     Finalement, le Tribunal souligne que l’intimée Delgado serait responsable de la formation à la succursale Décarie de WFG, mais souligne que le dirigeant responsable de cette succursale au sens de la loi à partir du début du programme de PQAP jusqu’en juillet 2017 était le représentant Karl Netten et qu’aucune mesure n’a été recommandée jusqu’à présent à l’encontre du dirigeant responsable qui occupait cette fonction au moment des faits allégués.

[273]     Dans cette affaire, le procureur de l’intimée Delgado allègue qu’en ne faisant pas témoigner les témoins 1, 2 et 3, l’Autorité nie le droit de sa cliente à un contre-interrogatoire de ces personnes et le fait pour le Tribunal d’accepter ce ouï-dire constitue un déni de justice pour sa cliente.   

[274]     Le Tribunal rejette cet argument et il ne rejettera pas purement et simplement les témoignages reçus par ouï-dire sur cette seule base. Il est bien établi qu’en droit administratif le ouï-dire est acceptable et tel que mentionné ci-haut, le Tribunal souligne que les règles de procédure du Tribunal le permettent expressément.

[275]     En l’instance, le Tribunal considère que le procureur de l’intimée était informé à l’avance du contenu des déclarations des témoins 1, 2 et 3, notamment par le détail de la procédure qui a été notifiée et les pièces à son soutien, à un tel point que c’est même lui qui a divulgué leur noms lors de l’audience.

[276]     De l’avis du Tribunal, il avait la possibilité de lui-même assigner ces témoins pour l’audience et il a eu l’occasion de contre-interroger l’enquêteuse de l’Autorité et en ce sens, les règles de justice naturelle ont bien été respectées.

[277]       L’auteur Patrice Garant écrit, dans son ouvrage La justice invisible ou méconnue. Propos sur la justice et la justice administrative[54], ce qui suit à propos du ouï-dire devant les tribunaux administratifs :

« Le ouï-dire est un type de preuve indirecte. C’est « ce qu’on connaît pour l’avoir entendu dire », c’est ce que rapporte une personne pour l’avoir entendu dire ou l’avoir appris par une personne qui, elle, en a été témoin soit oculaire, soit auriculaire. Le ouï-dire, ce sont les faits ou les événements que l’on relate à partir d’un rapport ou d’un journal que l’on a lu, ou à partir d’une émission de télévision que l’on a vue. Celui qui rapporte le ouï-dire devant un tribunal relate une preuve indirecte ou secondaire : Il est en quelque sorte le porte-parole des témoins directs de l’événement.

Le tribunal administratif, maître de la procédure, peut accueillir toute preuve même indirecte. En principe, la preuve par ouï-dire est admissible devant un tribunal quasi judiciaire pourvu que les règles de la justice naturelle soient respectées.

[…]

Cela signifie qu’un tribunal administratif peut admettre en preuve un rapport ou un document sans qu’il soit nécessaire que l’auteur du rapport ou que les personnes qui sont la source des informations factuelles contenues dans ce rapport ou document soient nécessairement interrogées ou contre-interrogées. Ce n'est pas là une condition de recevabilité de ladite preuve. Le tribunal administratif doit apprécier la pertinence et la force probante. Par prudence et suivant les circonstances, il se pourrait que le tribunal estime utile, voire nécessaire le contre-interrogatoire, en matière disciplinaire par exemple, mais c’est à lui, maître de la procédure et de la preuve, d’en décider. Il n’y est pas astreint par le Code civil ou le Code de procédure civile. Comme le rappelle Yves Ouellette, le tribunal doit, en admettant le ouï-dire, vérifier « si le moyen de preuve offre des garanties raisonnables de fiabilité et si toutes les parties ont la possibilité de le contredire ou de le corriger ». Et il ajoute que « l’impossibilité de contre-interroger ne rend pas le ouï-dire inadmissible ». Selon Lord Denning:

[…] the tribunal must observe the rules of natural justice, but this does not mean that it must be tested by cross-examination. It only means that the tribunal must give the other side a fair opportunity of commenting on it and of contradicting it.

Le tribunal administratif du Québec (TAQ) écrit :

Il est maintenant bien établi que le ouï-dire est acceptable devant les tribunaux administratifs, mais à la condition que le moyen de preuve ait des garanties raisonnables de fiabilité et que toutes les parties aient la possibilité de le contredire ou de le corriger. L’impossibilité de contre-interroger ne rend pas le ouï-dire inadmissible.

[…]

On peut donc soutenir qu’en droit administratif la preuve par ouï-dire est permise. Toutefois, le tribunal doit voir à ce que la partie adverse puisse faire face à cette preuve de façon adéquate, mais pas nécessairement pas la voie du contre-interrogatoire. » 

(Références omises)

[278]     Vu ce qui précède, le Tribunal, étant maître de sa procédure peut accueillir la preuve présentée par ouï-dire par l’enquêteuse de l’Autorité.

[279]      Cependant, il lui appartient d’en apprécier la force probante ainsi que la fiabilité.

[280]      En ce qui a trait à la fiabilité, voici comment s’exprime la Cour suprême à ce sujet dans l’affaire Smith[55]:

« Le critère de « fiabilité » dépend des circonstances dans lesquelles la déclaration en question a été faite. Si une déclaration qu’on veut présenter par voie de preuve par ouï-dire a été faite dans des circonstances qui écartent considérablement la possibilité que le déclarant ait menti ou commis une erreur, on peut dire que la preuve est « fiable », c’est-à-dire qu’il y a une garantie circonstancielle de fiabilité ».

[281]     Dans le présent dossier, le Tribunal a tenté de déterminer s’il y avait une garantie circonstancielle de fiabilité des déclarations des témoins 1, 2 et 3 rapportées par l’enquêteuse.

[282]     Or, de l’avis du Tribunal, dans le présent cas, cette garantie est difficile à établir, et ce, pour les raisons suivantes :

[283]     Premièrement le témoignage de l’intimée Delgado a mis en évidence le fait que le témoin 1 avait un intérêt personnel à dénoncer l’intimée afin de s’approprier sa clientèle, les témoins 2 et 3 sont quant à eux des amis du témoin 1 et avaient été recrutés à l’origine par le témoin 1 pour travailler auprès de WFG.

[284]     Deuxièmement, en contre-interrogatoire le procureur de l’intimée a demandé à l’enquêteuse si elle avait questionné les témoins 1, 2 et 3 sur les liens qui les unissaient et sur leurs relations avec l’intimée. Cette dernière a répondu par la négative à cette question et ignore les liens qui unissent les trois témoins et ignore les motifs qui auraient pu donner lieu à leurs déclarations. De l’avis du Tribunal, ces informations sont importantes pour permettre d’apprécier la fiabilité des informations obtenues.   

[285]     Troisièmement, les déclarations déposées en preuve par l’Autorité sont de résumés des entrevues entre l’enquêteuse de l’Autorité et les témoins en question. Ces résumés sont succincts et ces déclarations ne sont pas assermentées pas plus que les autres déclarations obtenues par l’enquêteuse.

[286]     Le Tribunal a également constaté qu’il est arrivé à l’audience que les propos tenus par l’enquêteuse dans son témoignage allaient au-delà ce qui est indiqué dans les résumés.

[287]     À titre d’exemple, pour le témoin 1, elle a indiqué que l’intimée Delgado était présente aux séances d’examens alors que le résumé indique que c’est madame Delgado ou un autre représentant qui était présent à l’examen. Pour le Tribunal et pour les droits de l’intimée Delgado la nuance est importante.

[288]     Quatrièmement, le Tribunal comprend que l’Autorité est maître de sa preuve et respecte ce fait. Cependant, aucun motif n’a été donné au Tribunal pour expliquer l’absence des témoins 1, 2 et 3 à l’audience sur le fond du dossier, alors qu’il était bien connu que l’intimée Delgado entendait contester sa suspension intérimaire.

[289]     Vu ce qui précède, le Tribunal ne peut se convaincre que le critère de fiabilité a été rencontré eu égard aux déclarations par ouï-dire faites à l’enquêteuse de l’Autorité à l’égard des témoins 1, 2 et 3 et privilégiera le témoignage sous serment de l’intimée Delgado et de ses deux témoins.

[290]     Pour ce qui est des autres témoignages recueillis par l’enquêteuse, deux ou trois confirment le stratagème de tricherie alors qu’environ 10 le nient. Certains lors des mêmes séances d’examen auxquelles ceux qui affirment le contraire ont assisté selon l’enquêteuse. Cette dernière souligne douter de la version de certains témoin qui ont nié pour cette raison et l’a mentionné au procureur de l’intimée Delgado. Par ailleurs, le Tribunal rappelle que le privilège d’apprécier la crédibilité des témoins relève du Tribunal.

[291]     De l’avis du Tribunal, le nombre de déclarations ne pallie à un vice de fiabilité des déclarations. En cas de doute sur la fiabilité, le Tribunal privilégiera la version entendue et assermentée de l’intimée.

[292]     Le Tribunal souligne que la suspension d’une inscription et d’un certificat est un geste grave de conséquences eu égard à la vie professionnelle d’un individu dans le domaine financier et a des conséquences financières importantes pour la personne sujette à la suspension.

[293]     En raison de ces conséquences graves, le Tribunal se doit d’être prudent devant ces contradictions. Dans le présent dossier, être prudent signifiera de permettre à l’intimée de poursuivre son activité pendant que l’Autorité termine son enquête et que jugement intervienne dans ce dossier après audition au fond. Ceci étant dans l’éventualité où l’Autorité dépose une telle demande suivant les conclusions de son enquête.

[294]     Tel que mentionné dans la décision Osman[56], si le Tribunal ne sait pas qui croire, il donnera le bénéfice du doute à l’intimée durant le temps de l’enquête

[295]     Dans la présente affaire, la suspension de l’intimée Delgado est demandée par l’Autorité pendant la durée de son enquête sur la base d’un manque d’intégrité de l’intimée Delgado pour avoir participé à un stratagème de tricherie.    

[296]     Il ne fait pas de doute pour le Tribunal que si les gestes reprochés à l’intimée Delgado avaient été prouvés par prépondérance de preuve, il aurait maintenu la suspension de l’intimée en raison du manque d’honnêteté et d’intégrité démontré par de tels gestes, ce qui ne cadre pas avec les obligations déontologiques d’un inscrit dans le domaine financier.

[297]     Par ailleurs, en tenant compte de la preuve et de la contre-preuve présentées lors de l’audience et en raison du fait qu’il ne considère moins fiables et probantes les déclarations présentées en preuve par ouï-dire dans le présent dossier que celles entendues sous serment à l’audience, le Tribunal juge que le fardeau de prépondérance de preuve requis n’a pas été rencontré pour justifier le maintien de cette suspension.

[298]     Dans son évaluation, le Tribunal a tenu également compte de plusieurs autres facteurs, notamment les suivants :

-       Pour le moment, des mesures sont en place chez WFG et eu égard à son dirigeant responsable en vertu de l’entente intérimaire conclue entre l’Autorité et WFG qui a été avalisée par le Tribunal en octobre dernier et qui se poursuivra pendant la durée de l’enquête de l’Autorité.

-       En effet, en raison de cette entente, toute possibilité qu’un stratagème de tricherie ait lieu à la succursale Décarie de WFG est éradiquée du seul fait qu’aucun examen n’y est tenu et qu’aucun représentant potentiel ne sera admis à un examen de l’Autorité jusqu’à ce que l’Autorité termine son enquête.

-       L’enquête dans ce dossier est toujours en cours et d’autres développements surviendront. L’Autorité a indiqué qu’elle se réservait le droit de déposer une autre procédure administrative visant l’un ou l’autre des intimés, ou toute autre personne visée par son enquête.

-       À partir de la preuve documentaire soumise, le Tribunal a également constaté que d’autres personnes pourraient être impliquées dans ce stratagème, s’il est éventuellement prouvé par prépondérance de preuve. L’inscription de ces personnes n’est pas suspendue en ce moment.

-       Aucune preuve n’a été présentée à ce jour au Tribunal eu égard à l’intimée Delgado faisant état d’un manque de compétence eu égard à des clients de WFG.

[299]     Ainsi, pour le moment et avec l’accord de l’Autorité, le Cabinet WFG peut poursuivre ses activités sans qu’il n’y ait à craindre pour la protection des investisseurs malgré qu’il y ait allégation qu’un tel stratagème de tricherie ait prévalu pour les représentants de cette firme, dont certains en ont peut-être bénéficié et continueraient d’exercer. Dans la mesure où une telle entente est acceptable dans les circonstances pour le cabinet WFG, les mêmes mesures devraient prévaloir pour l’intimée Delgado pendant la durée de l’enquête.

[300]     Or, vu les conclusions du Tribunal eu égard à l’intimée Delgado suite à la présente audience, le Tribunal juge approprié de lever la suspension de l’inscription et du certificat de l’intimée Delgado et les ordonnances rendues contre elle pour la durée de l’enquête.

[301]     Vu ce qui précède, le Tribunal modulera les conclusions qu’il rendra sur l’entente intervenue entre le cabinet WSG et l’intimée Delgado de manière à permettre à WFG de la réintégrer dans son emploi à sa discrétion.

[302]     Cependant et compte tenu qu’une enquête ne peut durer éternellement et vu la gravité des allégations portées à l’encontre de l’intimée Delgado, de l’intimé Iordanov et de WFG, le Tribunal juge approprié dans un but de protection du public de convoquer les parties devant le Tribunal dans les 120 jours de la présente décision pour fixer une date au mérite de la présente affaire ou d’informer le Tribunal des suites à donner à la présente affaire.

[303]     De plus, malgré la conclusion à laquelle en arrive le Tribunal eu égard à l’intimée Delgado, le Tribunal est préoccupé de ce qu’il a entendu et du fait qu’il est possible (sans pour autant qu’il n’y ait de prépondérance de preuve) que des personnes puissent offrir présentement des produits financiers au public en général en ayant participé à un stratagème de tricherie à leurs examens.

[304]     De l’avis du Tribunal, il est important dans l’intérêt public que la lumière se fasse rapidement sur cette affaire d’où la demande du Tribunal de revoir les parties dans les 120 prochains jours.

[305]     En ce qui a trait à l’entente intervenue entre l’intimée WFG, l’intimé Iordanov, et l’Autorité, convenue pour la durée de l’enquête, le Tribunal est d’accord avec la proposition soumise et juge que cette dernière est dans l’intérêt public.  Il prendra acte de l’entente intervenue à l’exception des modulations ci-haut mentionnées concernant l’intimée Delgado.

DÉCISION

POUR CES MOTIFS, le Tribunal administratif des marchés financiers, en vertu des articles 93 et 94 et 115.14 de la Loi sur l’Autorité des marchés financiers et de l’article 115 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers :

PREND ACTE de l’entente intervenue entre World Financial Group Insurance Agency of Canada inc., Iordan Dimitrov Iordanov et l’Autorité des marchés financiers au présent dossier et ce, jusqu’à ce que jugement intervienne sur le fond de la présente affaire, et ce, à l’exception de son paragraphe 2 a.

Cette entente est consignée dans le document intitulé « entente et engagements sur mesures de sauvegarde entre l’Autorité des marchés financiers, World Financial Group Insurance Agency of Canada inc. et Iordan Dimitrov Iordanov » et jointe au présent jugement.

PERMET à l’intimée World Financial Group Insurance Agency of Canada inc., à son entière discrétion, de lever la suspension de l’intimée Ma Florence Delgago.

ORDONNE à l’intimée World Financial Group Insurance Agency of Canada inc. et ses employés de se conformer aux engagements pris envers l’Autorité des marchés financiers dans l’entente intervenue avec cette dernière, pour la durée de l’enquête de l’Autorité des marchés financiers, à savoir :

        De ne dispenser aucune réunion d’information visant à fournir à des candidats potentiels des informations relatives à World Financial Group Insurance Agency of Canada inc. ou sur la formation requise afin que ces derniers puissent devenir représentants en assurance de personnes;

        De ne recruter quelque représentant que ce soit, ni transmettre à l’Autorité des marchés financiers une demande de rattachement d’un représentant en assurances;

        De ne référer aucun candidat  à aucune formation spécialisée dispensée par un organisme reconnu;

LÈVE la suspension antérieurement prononcée par le présent Tribunal sur le certificat portant le numéro 153406 et l’inscription portant le numéro 1795721 au nom de Ma Florence Delgado dans toutes les disciplines pour lesquelles elle est certifiée, et ce, pendant la durée de l’enquête de l’Autorité des marchés financiers.

LÈVE l’interdiction antérieurement prononcée par le présent Tribunal à l’encontre de Ma Florence Delgado de cesser toute activité que ce soit, tant en épargne collective qu’en assurance de personne.

CONVOQUE les parties à une audience pro forma à être tenue le 5 juillet 2018 à 14h00, à son siège, ou avant cette date selon la volonté de l’Autorité qui transmettra un avis de présentation à cette fin pour, selon le cas, fixer une date au mérite pour la suite de la présente affaire ou informer le Tribunal des développements et des suites à donner à ce dossier.

 

 

__________________________________

Me Elyse Turgeon, juge administratif

 

 

Me Ève Demers et Me Sylvie Boucher

 

(Contentieux de l’Autorité des marchés financiers)

 

Procureures de l’Autorité des marchés financiers

 

 

 

Me Irwin Liebman, accompagné de Bianca Desforges, stagiaire en droit

 

(Liebman Légal inc.)

 

Procureur de Ma Florence Delgado

 

 

 

Me Simon Jun Seida

 

(Blake, Cassels & Graydon s.e.n.c.r.l.)

 

Procureur de World Financial Group Insurance Agency of Canada inc. et Iordan Dimitrov Iordanov

 

 

 

Date d’audience :

8 décembre 2017  

 

 






[1]     Autorité des marchés financiers c. World Financial Group Insurance Agency of Canada Inc., 2017 QCTMF 102.

[2]     RLRQ, c. D-9.2.

[3]     RLRQ c. A-33.2.

[4]     Pièce D-1.

[5]     Pièce D-1.

[6]     Pièce D-2.

[7]     Pièce D-3.

[8]     Pièce D-4.

[9]     Pièce D-2.

[10]    Id.

[11]    Pièce D-5.

[12]    Autorité des marchés financiers c. World Financial Group Insurance Agency of Canada Inc., préc., note 1.

[13]    Pièce D-9.

[14]    Pièce D-11.

[15]    Pièce D-12.

[16]    Pièce D-8.

[17]    Pièce D-9.

[18]    Pièce D-12.

[19]    Pièce D-8.

[20]    Id.

[21]    Préc., note 3.

[22]    Préc., note 2.

[23]   Collège des médecins du Québec c. Genest, 2011 QCCA 1683.

[24]    Formule Pontiac Buick GMC inc. c. Bureau des services financiers, 2004 CanLII
7239 (QC C.S.), par. 41 et ss. et
Marston c. Autorité des marchés financiers, 2007 QCCQ 14913.

[25]   RLRQ, c. D-9.2, r. 7.

[26]    Préc., note 2.

[27]    RLRQ, c. D-9.2, r. 3.

[28]    Marston c. Autorité des marchés financiers, 2007 QCCQ 14913, par. 42.

[29]    Pezim c. Colombie-Britannique (Superintendent of Brokers), [1994] 2 RCS 557.

[30]    Préc., note 3.

[31]    Préc., note 2.

[32]    Id.

[33]    RLRQ, c. A-33.2, r. 1.

[34]    Autorité des marchés financiers c. Baazov, (2017) QCTMF 103.

[35]    Préc.,  note 33.

[36]    Préc., note 2.

[37]    RLRQ, c. D-9.2, r. 3.

[38]    Id.

[39]    Id.

[40]    Pièce D-8.

[41]    Pièce D-9.

[42]    Pièce D-10.

[43]    Pièce D-11.

[44]    Pièce D-12.

[45]    Osman c. Médecins (Corp. professionnelle des), [1994] D.D.C.P., p. 257.

[46]    Pièce D-12.

[47]    Pièce D-12.

[48]  Pièce D-10.

[49]  Pièce D-11.

[50]    Pièce D-9.

[51]    Pièce D-10.

[52]    Pièce D-9.

[53]    Pièce D-10.

[54]  Patrice Garant, La justice invisible ou méconnue. Propos sur la justice et la justice administrative, Éditions Yvon Blais, Montréal, 2014, p. 633.

[55]   R. c. Smith, [1992] 2 RCS 915.

 

[56]    Préc., note 45.

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