Autorité des marchés financiers (Québec)

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Autorité des marchés financiers c. Les Assurances Michel Gauthier inc.

 

 

TRIBUNAL ADMINISTRATIF
DES MARCHÉS FINANCIERS

 

 

 

CANADA

 

PROVINCE DE QUÉBEC

 

MONTRÉAL

 

 

 

DOSSIER N° :

2016-013

 

 

 

DÉCISION N° :

2016-013-001

 

 

 

DATE :

Le 10 mars 2017

 

_____________________________________________________________________

 

 

 

EN PRÉSENCE DE :

Me CLAUDE ST PIERRE

_____________________________________________________________________

 

 

 

 

 

AUTORITÉ DES MARCHÉS FINANCIERS

 

Partie demanderesse

 

c.

 

LES ASSURANCES MICHEL GAUTHIER INC.

 

et

 

MICHEL GAUTHIER

 

Parties intimées

 

 

 

 

 

 

 

Ordonnances de pénalités administratives, d’interdiction d’agir à titre de dirigeant responsable, d’imposition de conditions à l’inscription et mesures propres à assurer le respect de la loi

 

[art. 115 et 115.1, Loi sur la distribution de produits et services financiers, RLRQ, c. D‑9.2 et art. 93 et 94, Loi sur l’Autorité des marchés financiers, RLRQ, c. A-33.2]

 

 

 

 

 

 

 

Me Annie Parent

 

(Contentieux de l’Autorité des marchés financiers)

 

Procureure de l’Autorité des marchés financiers

 

 

 

 

 

 

 

Me Sonia Paradis

 

(Donati Maisonneuve s.e.n.c.r.l.)

 

Procureure de Michel Gauthier et Les Assurances Michel Gauthier inc.

 

 

 

 

 

 

 

Date d’audience :

18 janvier 2017

 


 

 

 

DÉCISION

 

[1]    Veuillez prendre note que le 18 juillet 2016, certaines dispositions législatives[1] sont entrées en vigueur, changeant le nom du Bureau de décision et de révision pour le Tribunal administratif des marchés financiers (ci-après le « Tribunal »)[2]. La présente décision est rendue avec cette nouvelle appellation.

L’HISTORIQUE

[2]    Le 7 juin 2016, l’Autorité des marchés financiers (l’ « Autorité ») a déposé au Tribunal une demande pour obtenir le prononcé des ordonnances suivantes, en vertu des articles 93 et 94 de la Loi sur l’Autorité des marchés financiers[3] et des articles 115, 115.1 et 115.9 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers[4] :

    Conclusions à l’égard du cabinet Les Assurances Michel Gauthier inc. (le « cabinet intimé »)

o    une pénalité administrative de 40 000 $ pour l’ensemble des manquements constatés lors de l’inspection et de l’enquête de l’Autorité et notamment, pour avoir toléré que Michel Gauthier agisse à titre de représentant, sans être titulaire d’un certificat dans la discipline d’assurance de dommages des particuliers, contrairement aux dispositions des articles 12 et 86 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers;

o    une pénalité administrative de 10 000 $ pour avoir manqué à un engagement souscrit, par le dirigeant responsable en son nom, auprès de l’Autorité;

o    la nomination d’un nouveau dirigeant responsable en remplacement de Michel Gauthier, l’identité du nouveau dirigeant responsable étant soumise à l’approbation préalable de l’Autorité;

o    la mise en place, à la satisfaction de l’Autorité, des mesures de contrôle et de surveillance, afin de s'assurer que le cabinet, son dirigeant responsable, ses représentants et ses employés respectent la Loi sur la distribution de produits et services financiers et ses règlements, plus particulièrement en ce qui a trait à la certification des représentants, et ce, sous forme d’engagement envers l’Autorité;

    Conclusions à l’égard de Michel Gauthier

o    une pénalité administrative de 5 000 $ pour avoir fait défaut de s’être acquitté adéquatement de ses obligations à titre de dirigeant responsable;

o    une interdiction d’agir, directement ou indirectement, à titre de dirigeant responsable du cabinet intimé ou de tout autre cabinet, et ce, pour une période de cinq ans;

o    l’imposition de conditions au certificat portant le numéro 157589 au nom de Michel Gauthier, à savoir:

  le représentant doit être rattaché à un cabinet dont il n’est pas le dirigeant responsable pour une période de cinq ans alors qu’il a un droit d’exercice valide;

  le représentant doit, pour une période de deux ans, alors qu’il a un droit d’exercice valide, exercer ses activités sous la responsabilité d’une personne nommée par le dirigeant responsable du cabinet auquel il sera rattaché. Le représentant doit faire parvenir à l’Autorité une attestation de la part du dirigeant responsable du cabinet dans laquelle celui-ci désignera la personne qui supervisera ses activités de représentant. Durant la supervision, un rapport mensuel de supervision doit être rempli en regard des activités de vente du représentant ainsi que des transactions avec les clients et être acheminé à l’Autorité, mensuellement;

[3]    À défaut par le cabinet intimé de se conformer aux ordonnances, l’Autorité demande au Tribunal de prononcer les conclusions suivantes :

                  la suspension de l’inscription du cabinet intimé;

                  une ordonnance au cabinet intimé de remettre tous ses dossiers clients, livres et registres du cabinet à l’Autorité des marchés financiers.

[4]   À défaut par l’intimé Michel Gauthier de se conformer aux ordonnances, l’Autorité demande au Tribunal de prononcer la suspension de son certificat.

LA DEMANDE DE L’AUTORITÉ

[5]    Le Tribunal reproduit ci-dessous les allégués qui apparaissent à la demande de l’Autorité :

LES PARTIES

1.            La demanderesse est l’organisme chargé notamment de l’administration de la Loi sur la distribution de produits et services financiers, RLRQ, c. D-9.2 (la « LDPSF »), et exerce les fonctions qui y sont prévues conformément à l’article 7 de la Loi sur l’Autorité des marchés financiers, RLRQ, c. A-33.2 (la « LAMF »);

2.            L’intimée Les Assurances Michel Gauthier inc. (« cabinet intimé ») est une personne morale légalement constituée depuis le 15 février 2007 en vertu de la Loi sur les sociétés par actions et ses activités y sont décrites comme étant « Entreprises de vente directe » et « Commissions sur vente », tel qu’il appert de l’état de renseignements d’une personne morale au registre des entreprises (« REQ »), pièce D-1;

3.            Le cabinet intimé est un cabinet qui détient une inscription auprès de l’Autorité, portant le numéro 512899, dans la discipline de l’assurance de dommages en vertu de la LDPSF, tel qu’il appert de l’attestation de droit de pratique du cabinet intimé, pièce D-2;

4.            À ce jour, tout comme au moment de l’inspection, deux représentants sont rattachés au cabinet intimé, tel qu’il appert d’un extrait de la base de données MISA de l’Autorité concernant le cabinet intimé, pièce D-3;

5.            Michel Gauthier détient un certificat émis par l’Autorité en vertu de la LDPSF, portant le numéro 157589, l’autorisant à agir à titre de représentant dans la catégorie de discipline de l’assurance de dommages des entreprises et est rattaché au cabinet intimé, tel qu’il appert de l’attestation de droit de pratique et d’un extrait de la base de données MISA de l’Autorité, en liasse pièce D-4;

6.            Michel Gauthier est président, secrétaire et unique actionnaire du cabinet intimé, tel qu’il appert de la pièce D-1;

7.            Michel Gauthier est également le dirigeant responsable du cabinet intimé, tel qu’il appert de la pièce D-2;

LES FAITS PERTINENTS AUX ORDONNANCES RECHERCHÉES

Inspection du 16 octobre 2013 par la Chambre de l’assurance de dommages (« ChAD »)

8.            En vertu des articles 107 et suivant de la LDPSF, l’Autorité a le pouvoir d’inspecter un cabinet pour s’assurer du respect de la loi et de ses règlements;

9.            Conformément à l’article 9 de la LAMF, l’Autorité peut déléguer son pouvoir d’inspection à un organisme d’autoréglementation tel la ChAD, ce qui fut fait dans le présent dossier;

10.          Le 16 septembre 2013, la ChAD avisait le cabinet intimé qu’une inspection aurait lieu à leur bureau, tel qu’il appert de l’avis d’inspection et du questionnaire de préinspection annexé, en liasse pièce D-5;

11.          Le 17 septembre 2013, par la décision portant le numéro 2013-INSP-0381, le directeur des services de l’inspection de l’Autorité a estimé nécessaire de procéder à l’inspection du cabinet intimé et a autorisé la ChAD à procéder à ladite inspection, tel qu’il appert d’une copie de la décision d’inspection, pièce D-6;

12.          Le 19 septembre 2013, l’Autorité a attesté de la qualité d’inspecteur de Jean-Sébastien Houle, Jean Rivard, Annick Gemme et Carolynn Isabell Vieira pour procéder notamment à l’inspection du cabinet intimé conformément à la décision D-6, tel qu’il appert d’une copie de l’attestation de la qualité d’un inspecteur, pièce D-7;

13.          Le 6 octobre 2013, Michel Gauthier acheminait par courriel à la ChAD le questionnaire préinspection dument complété, tel qu’il appert d’une copie dudit courriel et du questionnaire complété allégués, en liasse pièce D-8;

14.          Aux termes de l’inspection effectuée le 16 octobre 2013, plusieurs lacunes ont été relevées, lesquelles concernent les sujets suivants :

         La pratique illégale de Michel Gauthier;

         Compte séparé : solde négatif et tenue d’un registre des sommes dues au cabinet;

         Avis aux clients lors de transfert de polices auprès d’un autre assureur;

         Destruction des dossiers et registres;

         Absence de notes aux dossiers concernant notamment les démarches, conseils, analyse de besoins financiers et recommandation Dévoilement du lien d’affaires;

         Procédure de renouvellement de police;

         Identification du cabinet et du représentant;

         Partage de commissions;

         Règles de divulgation quant à la concentration du volume d’affaires;

         Absence de plan de continuité des activités en cas de pandémie et/ou autres situations d’urgence;

tel qu’il appert du rapport d’inspection et de ses annexes, en liasse pièce D-9;

15.          Par lettres du 9 décembre 2013, la ChAD informait le directeur des services de l’inspection de l’Autorité de lacunes graves constatées dans le cadre de l’inspection, tel qu’il appert d’une copie des lettres, en liasse pièce D-10;

16.          Notamment, deux (2) lacunes, mentionnées précédemment, étaient considérées comme majeures et nécessitaient une intervention dans les cinq jours suivant la réception du rapport d’inspection par le cabinet intimé, à savoir :

         La pratique illégale de Michel Gauthier;

         La gestion du compte séparé;

Pratique illégale

17.          Comme indiqué à l’attestation de droit de pratique D-4, Michel Gauthier détient un certificat lui permettant d’agir à titre de représentant dans la catégorie de discipline de l’assurance de dommages des entreprises uniquement;

18.          Dans le cadre de l’inspection réalisée, il a été constaté que Michel Gauthier a exercé des activités autres que celles permises par son certificat puisqu’il a agi à titre de représentant en assurance de dommages des particuliers;

19.          En offrant ce type de produits, Michel Gauthier exerçait illégalement en assurance de dommages des particuliers et contrevenait ainsi à l’article 12 de la LDPSF;

20.          Afin de remédier à cette situation, le cabinet intimé devait, tel qu’indiqué à l’annexe « Délai 5 jours » du rapport d’inspection D-9, confirmer à la ChAD avant le 17 décembre 2013, que Michel Gauthier avait cessé toute pratique en assurance de dommages des particuliers;

21.          Le 18 décembre 2013, la ChAD recevait l’annexe « Délai 5 jours » signée, confirmant ainsi que le cabinet intimé s’engageait à ce que Michel Gauthier cesse toute pratique en assurance de dommages des particuliers (ci-après l’« Engagement ») et que cet Engagement serait maintenu dans la pratique future du cabinet intimé, tel qu’il appert de l’annexe « Délai 5 jours » signée, pièce D-11;

Enquête de la Direction des enquêtes de l’Autorité

22.          Considérant la nature des manquements constatés par la ChAD, lors de son inspection de 2013 à l’égard du cabinet intimé, et plus particulièrement à l’égard des activités illégales de Michel Gauthier, le dossier a été transféré à la Direction des enquêtes de l’Autorité;

23.          En effet, au terme de cette inspection, la ChAD avait noté que Michel Gauthier avait exercé des activités dans une catégorie pour laquelle il n’était pas autorisé à agir en fonction de l’attestation de droit de pratique D-4;

24.          De même, dans le cadre de son inspection, la ChAD avait clairement indiqué à Michel Gauthier de cesser telle pratique, le cabinet intimé et Michel Gauthier s’étant d’ailleurs expressément engagés en ce sens par l’Engagement D-11;

25.          Toutefois, l’enquête a permis de révéler que ces activités se sont poursuivies;

26.          En effet, de façon à corroborer la situation dénoncée, l’Autorité a procédé à une enquête et a obtenu notamment copie de la documentation en assurance, auprès de quatre (4) assureurs, confirmant que Michel Gauthier a agi à titre de représentant pour des clients en assurance de dommages des particuliers;

27.          La preuve ainsi recueillie a révélé que Michel Gauthier a effectivement agi à titre de représentant en assurances de dommages des particuliers malgré le fait qu’il ait été avisé de cesser telle pratique et qu’un Engagement ait été souscrit en ce sens par lui et le cabinet intimé;

28.          De même, le cabinet intimé n’a pas veillé à ce que Michel Gauthier, à titre de représentant et dirigeant, se conforme à la LDPSF et ses règlements, ne respectant pas ainsi ses obligations et plus particulièrement, celles énoncées aux articles 85 et 86 de la LDPSF;

29.          De plus, l’enquête a permis de constater que la situation décrite précédemment n’est pas isolée, Michel Gauthier a desservi environ une centaine de clients en assurance de dommages des particuliers depuis la signature de l’Engagement D-11, tel qu’il appert de tableaux récapitulatifs pour chacun de ces quatre (4) assureurs énumérant les dossiers clients pour lesquels Michel Gauthier a agi à titre de représentant en assurances de dommages des particuliers, en liasse pièce D-12;

30.          En ce qui concerne ces clients, la preuve révèle que Michel Gauthier a personnellement signé la documentation à titre de représentant et/ou fait les démarches auprès de ces assureurs en vue de l’obtention d’une soumission d’assurance des particuliers ou son renouvellement, tel qu’il appert des tableaux récapitulatifs D-12;

31.          D’ailleurs, ces dites activités font partie intégrante des responsabilités incombant à un représentant en assurance de dommages des particuliers et pour lesquelles le représentant doit détenir une certification dans cette discipline;

32.          L’Autorité consent à rendre disponible, sur demande, l’ensemble de la documentation concernant les dossiers clients énoncés aux tableaux récapitulatifs D-12 et attestant que Michel Gauthier a agi comme représentant en assurance de dommages des particuliers à leur égard;

33.          En vertu de l’article 12 de la LDPSF, nul ne peut agir comme représentant, ni se présenter comme tel, à moins d’être titulaire d’un certificat délivré à cette fin par l’Autorité;

34.          Dans les circonstances, le cabinet intimé a fait défaut de veiller à ce que Michel Gauthier agisse conformément à la LDPSF et à ses règlements et l’Autorité est en droit d’intervenir et de demander que soit imposée une pénalité administrative au cabinet intimé de même qu’à Michel Gauthier à titre de dirigeant responsable;

[6]    L’Autorité a soumis les arguments suivants à l’appui de sa demande :

Conclusions recherchées et demande de pénalité administrative

35.          En agissant dans la discipline de représentant en assurance de dommages des particuliers sans être inscrit à ce titre, Michel Gauthier a enfreint la loi, et plus particulièrement, l’article 12 de la LDPSF :

« 12.     Sous réserve des dispositions du titre VIII, nul ne peut agir comme représentant, ni se présenter comme tel, à moins d'être titulaire d'un certificat délivré à cette fin par l'Autorité.

[…]»

36.          L’Autorité soumet qu’en agissant comme il l’a fait, le cabinet intimé a fait défaut de respecter les articles 84 à 86 de la LDPSF :

« 84.     Un cabinet et ses dirigeants sont tenus d’agir avec honnêteté et loyauté dans leurs relations avec leurs clients.

Ils doivent agir avec soin et compétence.

85.        Un cabinet et ses dirigeants veillent à la discipline de leurs représentants. Ils s’assurent que ceux-ci agissent conformément à la présente loi et à ses règlements.

86.        Un cabinet veille à ce que ses dirigeants et employés agissent conformément à la présente loi et à ses règlements. »

37.          Conformément à l’article 184 de la LDPSF, l’Autorité a pour mission de veiller à la protection du public relativement à l’exercice des activités régies par la LDPSF;

38.          L’Autorité considère que la protection du public exige une intervention de sa part;

39.          Considérant le pouvoir de l’Autorité, en vertu de l’article 93 de la LAMF, de demander au Bureau d’exercer, à la demande de l’Autorité, les fonctions et pouvoirs prévus par la loi;

40.          Considérant le pouvoir de l’Autorité, en vertu de l’article 94 de la LAMF, de demander au Bureau de prendre toutes les mesures propres à assurer le respect des dispositions de la loi;

41.          Considérant les pouvoirs du Bureau conférés par l’article 115 de la LDPSF d’imposer une pénalité administrative jusqu’à concurrence de deux millions de dollars (2 000 000 $) à un cabinet ayant fait défaut de respecter une disposition de la LDPSF ou ses règlements;

42.          En l’espèce, l’Autorité estime qu’une pénalité de 50 000 $ à l’égard du cabinet intimé constitue une pénalité juste et adéquate et qu’une pénalité de 5 000 $ à l’égard de Michel Gauthier à titre de dirigeant responsable est aussi juste et adéquate;

43.          De même, l’Autorité soumet que les manquements constatés lors de l’inspection et lors de l’enquête de l’Autorité à l’égard de Michel Gauthier sont suffisamment sérieux pour indiquer que Michel Gauthier ne dispose pas des compétences requises pour occuper le poste de dirigeant responsable du cabinet intimé;

44.          À titre de dirigeant responsable, Michel Gauthier se devait de faire preuve de diligence, d’agir avec soin et compétence et de veiller à ce que la LDPSF et ses règlements soient respectés par le cabinet et par tous les représentants, dont lui-même, ce qui n’est pas le cas en l’espèce;

45.          L’Autorité souligne que les responsabilités dévolues au dirigeant responsable d’un cabinet requièrent un degré supérieur de professionnalisme et d’habileté, puisque cette fonction est garante de la conformité au sein du cabinet et, par conséquent, de la protection du public;

46.          Considérant les pouvoirs du Bureau conférés par l’article 115 de la LDPSF à l’égard du cabinet ou du représentant, selon le cas, de radier, de révoquer, de suspendre ou d’assortir de restrictions ou de conditions le certificat d’un représentant;

47.          Considérant les pouvoirs du Bureau conférés par l’article 115.1 de la LDPSF d’interdire à une personne d’agir comme administrateur ou dirigeant d’un cabinet lorsqu’il fait l’objet d’une sanction en vertu de la LDPSF, et ce, pour une période maximale de cinq (5) ans;

48.          L’Autorité est d’avis qu’il y a lieu de demander le changement de dirigeant responsable du cabinet intimé et que soit prononcée par le Bureau une interdiction d’agir à titre de dirigeant responsable à l’encontre de Michel Gauthier, et ce, pour une période de cinq ans;

49.          L’Autorité est aussi d’avis qu’il y a lieu que le certificat de Michel Gauthier soit assorti de conditions, soit celle qu’il soit rattaché à un cabinet dont il n’est ni le dirigeant responsable, ni l’administrateur pour une période de cinq (5) ans et celle d’être supervisé lors de l’exécution de ses fonctions de représentant pour une période de deux (2) ans.

L’AUDIENCE

[7]    Dans le présent dossier, l’audience a procédé tel que prévu le 18 janvier 2017, en présence de la procureure de l’Autorité et de la procureure des intimés. Ces procureures ont déposé une entente intervenue entre les parties, entente qui est reproduite ci-après :

 

ENTENTE ET ADMISSIONS DES INTIMÉS

 

ATTENDU QUE l’Autorité des marchés financiers (ci-après l’« Autorité ») a notamment pour mandat d’assurer la protection des investisseurs, de favoriser le bon fonctionnement de l’industrie des services financiers et de prendre toute mesure prévue à la Loi sur la distribution de produits et services financiers, RLRQ, c. D-9.2 (ci-après la « LDPSF ») et de ses règlements;

ATTENDU QUE l’Autorité peut, en vertu de l’article 93 de la Loi sur l’Autorité des marchés financiers, RLRQ, c. A-33.2 (ci-après la « LAMF »), s’adresser au Tribunal administratif des marchés financiers (ci-après le « TMF ») afin d’exercer les fonctions et pouvoirs prévus par les dispositions de la LDPSF;

ATTENDU QUE l’Autorité peut également s’adresser au TMF, en vertu de l’article 94 de la LAMF, afin qu’il soit ordonné à un cabinet de prendre toute mesure propre à assurer le respect des dispositions de la Loi;

ATTENDU QUE le TMF peut imposer une pénalité administrative à l’encontre d’un cabinet, d’un de ses administrateurs ou dirigeants ou de l’un de ses représentants jusqu’à concurrence de deux millions de dollars (2 000 000 $);

ATTENDU QUE l’Autorité a signifié aux intimés une demande déposée au TMF en vertu des articles 93 et 94 de la Loi sur l’Autorité des marchés financiers, RLRQ, c. A‑33.2 et des articles 115, 115.1 et 115.9 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers, RLRQ, c. D-9.2 (ci-après la « Demande »), visant notamment l’imposition de pénalités administratives et le changement du dirigeant responsable;

ATTENDU QUE les parties désirent conclure une entente prévoyant des engagements souscrits et consignés à la présente et visant le règlement complet du présent dossier;

ATTENDU QUE ces engagements seront présentés auprès du TMF afin qu’il les rende exécutoires et ordonne aux parties de s’y conformer;

LES PARTIES CONVIENNENT CE QUI SUIT :

1.         Le préambule fait partie intégrante des présentes;

2.         Les Intimés admettent tous les faits allégués à la demande de l’Autorité produite au présent dossier du TMF, dont plus particulièrement les paragraphes 1 à 34;

3.         Les Intimés consentent également au dépôt des pièces alléguées à la demande sans autre formalité et en admettent le contenu;

4.         Le cabinet intimé, les Assurances Michel Gauthier inc., s’engage, en vertu des présentes, à payer à l’Autorité un montant de 26 000 $ à titre de pénalité administrative pour avoir fait défaut de respecter les articles 84 à 86 de la LDPSF et pour avoir notamment toléré que Michel Gauthier agisse, à titre de représentant, sans être titulaire d’un certificat dans la discipline d’assurance de dommages des particuliers, payable à raison de 2 170 $ par mois pendant douze (12) mois, à l’exception du dernier paiement qui sera de 2 130 $, débutant dans les quinze (15) jours de la décision à intervenir entérinant les présentes, étant entendu que dans les quinze (15) jours de la vente du cabinet intimé, le solde deviendra immédiatement exigible en totalité;

5.         De même, le cabinet intimé s’engage à payer à l’Autorité[5] un montant de 5 000 $ à titre de pénalité administrative pour avoir manqué à un engagement souscrit, par le dirigeant responsable en son nom, auprès de l’Autorité[6] payable à raison de 420 $ par mois pendant douze (12) mois, à l’exception du dernier paiement qui sera de 380 $, débutant dans les quinze (15) jours de la décision à intervenir entérinant les présentes, étant entendu que dans les quinze (15) jours de la vente du cabinet intimé, le solde deviendra immédiatement exigible en totalité;

6.         Le cabinet intimé s’engage à informer l’Autorité des démarches qu’il entend entreprendre pour procéder au changement du dirigeant responsable dans les quinze (15) jours de la décision à intervenir entérinant les présentes;

7.         Le cabinet intimé s’engage également à procéder au changement de dirigeant responsable dans les quarante-cinq (45) jours de la décision à intervenir entérinant les présentes, le dirigeant responsable devant être préalablement approuvé par l’Autorité;

8.         L’Intimé Michel Gauthier s’engage, en vertu des présentes, à payer à l’Autorité un montant de 4 000 $ à titre de pénalité administrative pour avoir fait défaut de s’être acquitté adéquatement de ses obligations à titre de dirigeant responsable, notamment pour avoir agi à titre de représentant, sans être titulaire d’un certificat dans la discipline d’assurance de dommages des particuliers, payable à raison de 335 $ par mois pendant douze (12) mois, à l’exception du dernier paiement qui sera de 315 $, dans les quinze (15) jours de la décision à intervenir entérinant les présentes, étant entendu que dans les quinze (15) jours de la vente du cabinet intimé, le solde deviendra immédiatement exigible en totalité;

9.         L’Intimé Michel Gauthier s’engage de plus à ne plus agir, directement ou indirectement, comme dirigeant responsable du cabinet intimé ou de tout autre cabinet d’assurance, et ce, pour une période de cinq (5) ans et consent à ce que son certificat portant le numéro 157589 soit assorti de la condition suivante : le représentant doit être rattaché à un cabinet dont il n’est pas le dirigeant responsable, et ce, pour une période de cinq (5) ans;

10.      De même, l’intimé Michel Gauthier consent à ce que son certificat portant le numéro 157589 soit assorti de la condition suivante : le représentant doit, pour une période de deux ans alors qu’il a un droit d’exercice valide, exercer ses activités sous la responsabilité d’une personne nommée par le dirigeant responsable du cabinet auquel il sera rattaché et faire parvenir à l’Autorité, au plus tard dans les quarante-cinq (45) jours de la décision à être rendue, une attestation de la part du dirigeant responsable du cabinet dans laquelle celui-ci désignera la personne qui supervisera ses activités de représentant.

11.      De plus, advenant que la vente du cabinet intimé ne soit pas réalisée dans les quarante-cinq (45) jours de la décision à intervenir entérinant les présentes, le cabinet intimé s’engage auprès de l’Autorité à mettre en place des mesures de contrôle et de surveillance afin de s’assurer que les représentants qui sont rattachés auprès du cabinet intimé respectent la LDPSF et ses règlements, plus particulièrement en ce qui a trait à la certification des représentants. Aussi, le cabinet intimé s’engage à voir au maintien de ses politiques à être mises en place ou déjà mises en place, étant entendu que lesdites politiques devront nécessairement être conformes aux obligations législatives et réglementaires. Enfin, le cabinet intimé s’engage à s’assurer du respect par ses représentants et employés, de la législation, de la réglementation et de ces dites politiques;

12.      Les parties reconnaissent que la présente transaction et les engagements sont conclus dans l’intérêt du public en général;

13.      Les Intimés reconnaissent avoir lu toutes les clauses des présentes et reconnaissent en avoir compris la portée et s’en déclarent satisfaits, d’autant plus qu’ils ont eu tout le loisir de consulter un avocat;

14.      Les Intimés consentent donc à ce que le TMF prononce une décision par laquelle il entérine la présente transaction et les engagements, les rend exécutoires en plus d’ordonner aux parties de s’y conformer;

15.      Les Intimés reconnaissent que les conditions et engagements énoncés aux présentes constituent des engagements souscrits par ces derniers auprès de l’Autorité;

16.      Les parties conviennent de ne faire aucune déclaration publique incompatible avec les conditions des présentes;

17.      Les présentes ne sauraient être interprétées à l’encontre de l’Autorité à titre de renonciation à ses droits et recours lui étant attribués en vertu de la LAMF, la LDPSF ou de toutes autres lois ou règlements pour toute autre violation passée, présente ou future de la part des Intimés.

ET LES PARTIES ONT SIGNÉ :

 

À Québec, ce 18 janvier 2017

 

À St-Hubert, ce 17 janvier 2017

 

(s) Contentieux de l’Autorité des marchés financiers

 

 

 

(s) Michel Gauthier

CONTENTIEUX DE L’AUTORITÉ des

marchés financiers

(Me Annie Parent)

Procureurs de la Demanderesse

 

les assurances michel gauthier INC.

Par : Michel Gauthier

Dirigeant responsable

 

 

 

 

 

À St-Hubert, ce 17 janvier 2017

 

(s) Michel Gauthier

 

 

MICHEL GAUTHIER

 

 

 

 

 

À Montréal, ce 18 janvier 2017

 

(s) Donati Maisonneuve

 

 

DONATI MAISONNEUVE, AVOCATS

(Me Sonia Paradis)

Procureurs des intimés

       La présentation de l’Autorité

[8]    La procureure de l’Autorité a traité de l’entente conclue entre les parties. Les intimés au dossier reconnaissent les faits allégués dans la demande de l’Autorité, consentent au dépôt des pièces et en admettent le contenu. Le cabinet intimé consent à payer une pénalité administrative de 26 000 $ à l’Autorité. Cette procureure avise le Tribunal que le susdit cabinet fait l’objet d’un processus de vente, ce qui a eu une influence sur l’entente.

[9]    Le cabinet intimé consent également à payer une pénalité administrative de 5 000 $ à la Chambre de l’assurance de dommages, pour avoir manqué un engagement souscrit par le dirigeant responsable en son nom. Le cabinet intimé est également d’accord pour procéder au changement de dirigeant responsable.

[10]    Quant à Michel Gauthier, intimé en l’instance, il consent à payer une pénalité administrative de 4 000 $ et consent à une supervision de deux ans et à une interdiction d’agir à titre de dirigeant responsable pour une période de cinq ans. La procureure déclare que sa cliente est satisfaite de l’entente et estime que la protection du public est assurée.

[11]    Elle résume ensuite les faits de la cause; il s’agit d’un dossier de pratique illégale, alors que Michel Gauthier n’était pas certifié dans la discipline de l’assurance de dommages des particuliers. En agissant depuis 2013, il a ainsi agi à 100 reprises. Il appert que Michel Gauthier avait signé un engagement comme quoi il cesserait les pratiques qui lui étaient reprochées.

[12]    Or, il n’a pas respecté cet engagement. La procureure soumet ensuite deux décisions de jurisprudence à cet égard[7]. Elle indique que les intimés sont dans le processus de vente du cabinet. Elle note que Michel Gauthier est à l’aube de la retraite. Elle souligne que les intimés ont bien collaboré dans le présent dossier. Et la présence d’un procureur pour les intimés a contribué à rassurer l’Autorité.

[13]    L’Autorité se dit satisfaite de l’entente conclue qui contribuera à la protection du public. Et cela aura aussi un effet dissuasif.

          La présentation des intimés

[14]    La procureure des parties intimées a également souligné l’effet dissuasif que pourrait avoir l’entente au dossier et s’en déclare satisfaite pour ses clients. Elle avance que la protection du public est assurée. Elle indique que Michel Gauthier a fait les démarches nécessaires pour mettre son cabinet en vente, ajoutant qu’il pratiquait à partir de chez lui. Il fait le nécessaire pour passer le flambeau au cabinet qui en effectuera l’acquisition, étant entendu qu’il ne sera pas dirigeant responsable. Michel Gauthier accepte d’être supervisé pour une période de deux ans.

[15]    Elle souligne que pour son client, il y avait une incompréhension de ce qu’il avait fait avant l’inspection de la Chambre de l’assurance de dommages et ce qu’il devait faire pour l’avenir, en expliquant le tout. Par ses gestes, il était sûr de respecter l’engagement auquel il avait souscrit auprès de cette chambre. Son client a agi de bonne foi, n’ayant pas compris la situation, jusqu’à ce son avocate lui explique le tout. Il n’avait donc pas le moindre caractère intentionnel de sa part, pensant qu’il respectait son engagement.

[16]    Cette procureure reconnaît qu’il y a eu pratique illégale et de nombreux dossiers en jeu, ce qui fait que les montants qui ont été négociés sont reflétés dans l’entente. Mais c’est le seul événement de cette nature qui soit arrivé dans toute sa carrière, carrière qui se termine maintenant. Elle rappelle que la clientèle de cet intimé n’a pas subi de pertes et qu’il a collaboré avec l’Autorité, désirant obtenir une entente qui serait acceptable à tous. Elle demande au Tribunal d’en prendre acte.

L’ANALYSE

[17]    L’Autorité a demandé au Tribunal de prononcer certaines ordonnances à l’égard du cabinet Les Assurances Michel Gauthier inc. et de Michel Gauthier, intimés en l’instance. Il appert que Michel Gauthier a agi dans la discipline de représentant en assurance de dommages des particuliers alors qu’il n’était pas inscrit à ce titre auprès de l’Autorité, un manquement à l’article 12 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers[8].

[18]    Il appert en effet que Michel Gauthier a exercé de telles activités en assurance de dommages des particuliers alors qu’il est inscrit en assurances de dommages des entreprises. Le cabinet intimé, par l’intermédiaire de son dirigeant responsable Michel Gauthier, s’est alors engagé à ce que ce dernier cesse toute pratique illégale reprochée. Mais une inspection de la Chambre de l’assurance de dommages a permis de révéler que celle-ci continuait, malgré l’engagement souscrit au contraire. L’enquête de l’Autorité a confirmé ces faits. Il appert donc que ni Michel Gauthier ni le cabinet intimé ne se sont conformés à leurs obligations, dont celles relevant du dirigeant responsable.

[19]    L’enquête de cet organisme a révélé que Michel Gauthier avait desservi une centaine de clients en assurances de dommages de particuliers, malgré le fait qu’il n’ait pas été inscrit pour ce faire et que le cabinet intimé s’était engagé à ce qu’il ne le fasse plus. Et vu le volume des faits reprochés à Michel Gauthier et au cabinet intimé, il est difficile de qualifier le tout d’opération isolée. La preuve de l’Autorité indique l’implication personnelle de Michel Gauthier; il a personnellement signé la documentation à titre de représentant et fait lui-même les démarches auprès des assureurs.

[20]    En laissant se perpétuer la commission des divers actes décrits plus haut, le cabinet intimé a fait défaut de respecter les articles 84 à 86 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers :

« 84. Un cabinet et ses dirigeants sont tenus d’agir avec honnêteté et loyauté dans leurs relations avec leurs clients.

Ils doivent agir avec soin et compétence.

85. Un cabinet et ses dirigeants veillent à la discipline de leurs représentants. Ils s’assurent que ceux-ci agissent conformément à la présente loi et à ses règlements.

86. Un cabinet veille à ce que ses dirigeants et employés agissent conformément à la présente loi et à ses règlements. »

[21]    De ce fait, l’Autorité s’est adressée au Tribunal pour lui demander d’exercer les pouvoirs qui lui sont conférés par la loi, y compris de prononcer toute mesure propre à assurer le respect de la loi[9]. Il appert que dans le présent dossier, les manquements que l’inspection et l’enquête de l’Autorité ont révélés étaient suffisamment importants pour qu’on puisse s’interroger à savoir si Michel Gauthier possédait les compétences requises pour occuper un poste de dirigeant responsable.

[22]    Il aurait dû faire preuve de diligence, agir avec soin et compétence et veiller à ce que les dispositions de la Loi sur la distribution de produits et services financiers et de ses règlements soient respectées par le cabinet et par les représentants, à commencer par lui-même; ce n’était pas le cas. Or, il appert que la fonction de dirigeant responsable au sein d’un cabinet requiert un degré supérieur de professionnalisme et d’habileté, car elle est garante de la conformité de ce cabinet et donc de la protection du public.

[23]    Dans les circonstances actuelles du dossier, tout en considérant aussi l’entente conclue entre les parties au présent dossier, l’Autorité en est venue à demander au Tribunal d’exercer les pouvoirs qui lui sont conférés par les articles 115 et 115.1 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers et de demander le changement de dirigeant responsable au sein du cabinet Les Assurances Michel Gauthier inc.

[24]    Elle demande aussi à la présente instance d’interdire à Michel Gauthier d’agir à titre de dirigeant responsable pour une période de cinq ans et d’assortir son certificat de la condition que ce dernier ne soit ni dirigeant responsable ni administrateur pour une période de cinq ans et qu’il soit supervisé lors de l’exercice de ses fonctions de représentant pour une période de deux (2) ans.

[25]    La procureure de l’Autorité a soumis au Tribunal des décisions qu’il a précédemment prononcées[10] dans des cas où les faits étaient en partie similaires à ceux du présent dossier. Le Tribunal retient le raisonnement qu’il avait fait dans une de ces causes, quant aux faits reprochés, estimant qu’il reproduit bien l’esprit dans lequel il entend prononcer la présente décision :

« [29]  Dans le document intitulé « Transaction et engagements » que les parties ont signé et déposé au cours de l’audience, les intimés ont admis tous les faits allégués à la demande de l’Autorité et ont consenti au dépôt des pièces à l’appui des allégués de cette procédure. Ces intimés, ainsi que la mise en cause Invico, ont pris un certain nombre d’engagements, dont le paiement de pénalités administratives, le changement du dirigeant responsable et la mise en place de mesures de contrôle et de surveillance.

[30]  L’enquête de l’Autorité avait en effet démontré que le cabinet Invico Investissements ne s’est pas conformé aux dispositions de la Loi sur la distribution de produits et services financiers, puisqu’il a laissé une personne non inscrite agir comme représentant en assurance et se présenter comme tel. Il s’est avéré que Marc St-Onge, intimé, a signé, comme représentant, des propositions d’assurance alors que ce n’est pas lui qui avait recueilli les renseignements nécessaires pour identifier les besoins des clients. C’était plutôt la personne non inscrite qui l’avait fait.

[31]  Or, l’Autorité avait avisé Marc St-Onge le 1er octobre 2013 que cette personne n’était plus rattachée au cabinet intimé et ne pouvait plus agir par son entremise dans le domaine de l’assurance de personnes. De plus, les gestes reprochés à Marc St-Onge et au cabinet Invico Investissements sont survenus postérieurement à la réception par ces derniers de l’avis de l’Autorité; dans l’esprit du Tribunal, cela peut laisser supposer d’une intention de leur part de contrevenir à la loi.

[32]  Il est difficile pour la présente instance de croire que Marc St-Onge ignorait les actes posés par la personne non inscrite, actes qui sont aux yeux du Tribunal susceptibles d’occasionner un risque pour le public. Les deux intimés ont donc manqué à leur devoir de supervision, en n’ayant pas su mettre en place des mesures destinées à éviter que les actes qui ont été commis puissent survenir.

[33]  Il appert donc que ni Marc St-Onge ni Invico Investissements n’ont veillé à la discipline de l’un de leurs représentants, ni ne se sont-ils assurés qu’il agissait conformément à la loi et à ses règlements. Marc St-Onge aurait dû, à titre de dirigeant responsable, agir avec diligence et veiller à ce que la Loi sur la distribution de produits et services financiers et les règlements adoptés pour son application soient respectés.

[34]  Dans ces circonstances, Marc St-Onge ne dispose pas des compétences requises pour occuper ce poste dans le cabinet intimé ou dans un autre cabinet d’assurance. C’est pourquoi l’Autorité s’est adressée au Tribunal et lui a demandé de prononcer les ordonnances décrites dans sa demande du 19 janvier 2016.

[35]  Les parties au litige ont ensuite conclu une entente qui a été soumise à la présente instance. Les intimés ont reconnu les faits qui leur sont reprochés et ont donné leur accord au prononcé de décisions qu’on retrouve décrites plus haut dans cette entente. La procureure de l’Autorité a énoncé les facteurs qu’elle proposait au Tribunal de considérer dans l’imposition des mesures que les parties lui suggèrent d’imposer d’un commun accord. Ce dernier est essentiellement d’accord pour retenir ces facteurs et exprime son accord avec les commentaires que cette procureure a exprimés à l’égard de chacun d’entre eux. »[11]

[26]    Considérant les circonstances du présent dossier, le Tribunal prend acte du document intitulé « Entente et admissions des intimés » qui a été signé par Les Assurances Michel Gauthier inc. et Michel Gauthier, parties intimées en l’instance et la représentante de l’Autorité, demanderesse en l’instance. Il est également prêt à accueillir la demande de l’Autorité et à prononcer les ordonnances que cette dernière a requises, tout en tenant compte des termes de la susdite entente. Le Tribunal estime que cette décision contribue à la protection du public et de l’intégrité des marchés.

LA DÉCISION

[27]    Le 7 juin 2016, le Tribunal a été saisi par l’Autorité d’une demande à l’encontre de la société Les Assurances Michel Gauthier inc. et Michel Gauthier. À l’audience du 18 janvier 2017, une entente conclue entre les parties au présent dossier a été déposée. Le Tribunal a pris connaissance de la demande de cet organisme et de l’entente conclue entre les parties. Il a entendu les représentations des procureures au dossier. Il est maintenant prêt à prononcer sa décision, le tout en vertu des articles 93 et 94 de la Loi sur l’Autorité des marchés financiers[12] et des articles 115 et 115.1 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers[13].

PAR CES MOTIFS, le Tribunal administratif des marchés financiers :

ACCUEILLE la demande de l’Autorité des marchés financiers, demanderesse en l’instance;

Ordonnances de pénalités administratives, en vertu de l’article 93 de la Loi sur l’Autorité des marchés financiers et de l’article 115 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers :

                     IMPOSE à la société Les Assurances Michel Gauthier inc. une pénalité administrative de 26 000 $, pour avoir fait défaut de respecter les articles 84 à 86 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers et pour avoir notamment toléré que Michel Gauthier agisse, à titre de représentant, sans être titulaire d’un certificat dans la discipline d’assurance de dommages des particuliers;

[28]    La susdite pénalité administrative sera payable à raison d’un montant de 2 170 $ par mois pendant douze (12) mois, à l’exception du dernier paiement qui sera de 2 130 $, débutant dans les quinze (15) jours de la date du prononcé de la présente décision, étant entendu que dans les quinze (15) jours de la vente du cabinet intimé, le solde deviendra immédiatement exigible en totalité.

                     IMPOSE à la société Les Assurances Michel Gauthier inc. une pénalité administrative de 5 000 $, pour avoir manqué à un engagement souscrit, par le dirigeant responsable en son nom, auprès de l’Autorité;

[29]    La susdite pénalité administrative sera payable à la Chambre de l’assurance de dommages à raison d’un montant de 420 $ par mois pendant douze (12) mois, à l’exception du dernier paiement qui sera de 380 $, débutant dans les quinze (15) jours du prononcé de la présente décision, étant entendu que dans les quinze (15) jours de la vente du cabinet intimé, le solde deviendra immédiatement exigible en totalité.

                     IMPOSE à Michel Gauthier une pénalité administrative de 4 000 $, pour avoir fait défaut de s’être acquitté adéquatement de ses obligations à titre de dirigeant responsable, notamment pour avoir agi à titre de représentant, sans être titulaire d’un certificat dans la discipline d’assurance de dommages des particuliers;

[30]    La susdite pénalité administrative sera payable à raison d’un montant de 335 $ par mois pendant douze (12) mois, à l’exception du dernier paiement qui sera de 315 $, dans les quinze (15) jours du prononcé de la présente décision, étant entendu que dans les quinze (15) jours de la vente du cabinet intimé, le solde deviendra immédiatement exigible en totalité.

Ordonnance d’interdiction d’agir à titre de dirigeant responsable, en vertu de l’article 93 de la Loi sur l’Autorité des marchés financiers et de l’article 115.1 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers :

                     INTERDIT à Michel Gauthier d’agir, directement ou indirectement, à titre de dirigeant responsable du cabinet intimé ou de tout autre cabinet d’assurance, et ce, pour une période de cinq (5) ans;

Ordonnance d’imposition de conditions à un certificat, en vertu de l’article 93 de la Loi sur l’Autorité des marchés financiers et de l’article 115 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers :

                     ASSORTIT le certificat de Michel Gauthier, portant le numéro 157589, des conditions suivantes :

o    « le représentant doit être rattaché à un cabinet dont il n’est pas le dirigeant responsable, et ce, pour une période de cinq (5) ans, à compter de la date de la décision du Tribunal administratif des marchés financiers portant le numéro n° 2016‑013‑001 »; et

o    « le représentant doit, pour une période de deux ans, à compter de la date de la décision du Tribunal administratif des marchés financiers portant le numéro n° 2016‑013‑001, alors qu’il a un droit d’exercice valide, exercer ses activités sous la responsabilité d’une personne nommée par le dirigeant responsable du cabinet auquel il sera rattaché et faire parvenir à l’Autorité, au plus tard dans les quarante-cinq (45) jours de la date de la présente décision, une attestation de la part du dirigeant responsable du cabinet dans laquelle celui-ci désignera la personne qui supervisera ses activités de représentant »;

Mesures propres à assurer le respect de la loi, en vertu de l’article 94 de la loi sur l’Autorité des marchés financiers :

                     ORDONNE à la société Les Assurances Michel Gauthier inc. d’informer l’Autorité des démarches qu’elle entend entreprendre pour procéder au changement du dirigeant responsable dans les quinze (15) jours du prononcé de la présente décision;

                     ORDONNE à la société Les Assurances Michel Gauthier inc. de procéder au changement de dirigeant responsable dans les quarante-cinq (45) jours du prononcé de la présente décision, le dirigeant responsable devant être préalablement approuvé par l’Autorité;

[31]    Advenant que la vente du cabinet Les Assurances Michel Gauthier inc. ne soit pas réalisée dans les quarante-cinq (45) jours du prononcé de la présente décision :

                     ORDONNE à la société Les Assurances Michel Gauthier inc. de mettre en place des mesures de contrôle et de surveillance, afin de s’assurer que les représentants qui y sont rattachés respectent la Loi sur la distribution de produits et services financiers et ses règlements, plus particulièrement en ce qui a trait à la certification des représentants;

                     ORDONNE à la société Les Assurances Michel Gauthier inc. de maintenir ses politiques à être mises en place ou déjà mises en place, étant entendu que lesdites politiques devront nécessairement être conformes aux obligations législatives et réglementaires; et

                     ORDONNE à la société Les Assurances Michel Gauthier inc. d’assurer le respect par ses représentants et par ses employés, de la législation, de la réglementation et des susdites politiques.

Fait à Montréal, le 10 mars 2017.

 

 

 

 

 

(S) Claude St Pierre

 

Me Claude St Pierre, vice-président

 

 



[1]    Loi concernant principalement la mise en oeuvre de certaines dispositions du discours sur le budget du 26 mars 2015, L.Q. 2016, c.7, art. 171 à 180, en vertu de de l’article 225, al. 1 par. 3.

[2]    Dans les paragraphes subséquents, l’expression « Tribunal » est substituée à l’expression « Bureau », et ce, même lorsque l’on réfère à un fait survenu antérieurement au 18 juillet 2016.

[3]     RLRQ, c. A-33.2.

[4]     RLRQ, c. D-9.2.

[5]     En cours d’audience, la procureure de l’Autorité a avisé le Tribunal que le paiement de la pénalité administrative de 5 000 $ par le cabinet devait être fait auprès de la Chambre de l’assurance de dommages et non auprès de l’Autorité. Elle a assuré la présente instance que l’entente serait modifiée pour refléter ce fait.

[6]     Ibid.

[7]     Autorité des marchés financiers c. Invico Investissements, 2016 QCTMF 49; et, Autorité des marchés financiers c. Groupe Depretis inc., 2014 QCBDR 94.

[8]     Précitée, note 4, art. 12.  Sous réserve des dispositions du titre VIII, nul ne peut agir comme représentant, ni se présenter comme tel, à moins d’être titulaire d’un certificat délivré à cette fin par l’Autorité.

[9]     Loi sur l’Autorité des marchés financiers, précitée, note 3, art 94.

[10]    Précitées, note 5.

[11]    Autorité des marchés financiers c. Invico Investissements, précitée, note 5, par. 29-35.

[12]    Précitée, note 3.

[13]    Précitée, note 4.

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