Autorité des marchés financiers (Québec)

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Autorité des marchés financiers c. Alliance pour la santé étudiante au Québec inc.

 

 

TRIBUNAL ADMINISTRATIF
DES MARCHÉS FINANCIERS

 

 

 

CANADA

 

PROVINCE DE QUÉBEC

 

MONTRÉAL

 

 

 

DOSSIER N° :

2015-032

 

 

 

DÉCISION N° :

2015-032-001

 

 

 

DATE :

Le 22 décembre 2016

 

______________________________________________________________________

 

 

 

EN PRÉSENCE DE :

Me LISE GIRARD

______________________________________________________________________

 

 

 

 

 

 

AUTORITÉ DES MARCHÉS FINANCIERS

 

Partie demanderesse

 

c.

 

ALLIANCE POUR LA SANTÉ ÉTUDIANTE AU QUÉBEC INC.

et

LEV BUKHMAN

et

PATRICE ALLARD

 

Parties intimées

 

 

 

______________________________________________________________________

 

 

 

DÉCISION

 

______________________________________________________________________

 

 

 

 

 

[1]           Veuillez prendre note que le 18 juillet 2016, certaines dispositions législatives[1] sont entrées en vigueur changeant le nom du Bureau de décision et de révision pour le Tribunal administratif des marchés financiers (ci-après le « Tribunal »)[2]. La présente décision est rendue sous cette appellation.

 

CONTEXTE

[2]           Le 1er décembre 2015, l’Autorité des marchés financiers (ci-après l’« Autorité ») a déposé au Tribunal une demande visant à obtenir les conclusions suivantes :

         L’imposition des pénalités administratives suivantes :

o   à l’encontre de l’intimée Alliance pour la santé étudiante au Québec inc. (« ASEQ ») un montant de 60 000 $;

o   à l’encontre de l’intimé Lev Bukhman, à titre de dirigeant responsable du cabinet de l’ASEQ, un montant de 10 000 $;

o   à l’encontre de l’intimé Patrice Allard, à titre de dirigeant du cabinet de l’ASEQ, un montant de 10 000 $;

         La nomination d’un nouveau dirigeant responsable dans les 90 jours d’une décision à intervenir;

         La mise en place de mesures de contrôle et de surveillance à la satisfaction de l’Autorité dans les 30 jours d’une décision à intervenir;

         Une interdiction à Lev Bukhman d’agir comme dirigeant responsable du cabinet de l’ASEQ ou de tout autre cabinet pour 3 ans;

         Une interdiction à Patrice Allard d’agir comme dirigeant responsable du cabinet de l’ASEQ ou de tout autre cabinet pour 3 ans.

[3]           À défaut, l’Autorité demandait la suspension de l’inscription du cabinet de l’ASEQ (ci-après l’intimée « ASEQ ») et la remise des dossiers clients.

[4]           Suivant plusieurs audiences pro forma en chambre de pratique, le dossier a été reporté au 15 décembre 2016 pour le dépôt d’une entente intervenue entre les parties.

AUDIENCE

[5]           Le 15 décembre 2016, l’audience s’est tenue en présence de la procureure de l’Autorité et du procureur des intimés.

[6]           La procureure de l’Autorité a déposé l’entente intitulée « Transaction et admission des intimés » signée par toutes les parties.

[7]           Les procureurs ont fait des représentations et demandé au Tribunal de l’entériner étant conclue dans l’intérêt public.

[8]           La procureure de l’Autorité a déposé de consentement l’ensemble des pièces au présent dossier.

[9]           Les procureurs ont mentionné que certaines conditions avaient déjà été rencontrées soit le changement du dirigeant responsable de l’intimée ASEQ et procédé à la nomination d’un nouveau dirigeant responsable en remplacement de l’intimé Lev Bukhman (ci-après « l’intimé Bukhman »), et ce, ayant été préalablement approuvé par l’Autorité.

[10]        En conséquence, les parties ont demandé de rayer l’émission de ces ordonnances dans l’entente.

[11]        Dans ses représentations, la procureure de l’Autorité a fait la narration des faits portant sur les manquements commis par les intimés et expliqué les termes de l’entente.

[12]        La procureure de l’Autorité a souligné la collaboration des intimés dans le présent dossier ainsi que leur consentement à créer et maintenir un registre qui identifierait toutes sommes versées à sa clientèle comprenant également les déclarations signées par les représentants de ces clients qui préciseront la justification, la provenance des sommes, les dates et les montants consentis, tel que décrit à la nouvelle entente au paragraphe 6 b) sous-titre ii, laquelle est jointe à la présente décision.

[13]        Il a été convenu que ces sommes ne peuvent provenir d’un partage de commissions et de rabais de primes qui sont interdits par la législation.

[14]        De plus, l’intimée ASEQ convient de mettre en place des mesures accrues de surveillance et de contrôle tel que, de créer un poste de chef de conformité et d’opérations.

[15]        En conséquence, la procureure de l’Autorité a mentionné que les pénalités administratives demandées sont appropriées et reflètent les principes jurisprudentiels[3] dans le contexte de la présente affaire.

[16]        Elle précisera qu’il n’y a pas de jurisprudence similaire à la présente affaire, mais que dans l’imposition de pénalités administratives convenues dans l’entente, ils ont tenu compte des facteurs aggravants et atténuants dans le présent dossier.

[17]        Suivant les questions du Tribunal, elle ajoutera que les manquements de l’intimé Patrice Allard (ci-après l’intimé « Allard ») se sont déroulés sur une période de 7 ans, soit de 2005 à 2012. Elle indiquera qu’aucune plainte n’a été formulée à l’Autorité et que la situation s’est régularisée avant même l’intervention de l’Autorité.

[18]        Par ailleurs, elle convient, que les manquements sont graves surtout celles d’avoir permis la vente et le conseil de produits d’assurance par une personne non-inscrite conformément à la loi et le versement de sommes d’argent en contrepartie du renouvellement de polices d’assurance collective de personnes auprès de ces associations étudiantes.

[19]        La procureure de l’Autorité a confirmé que le montant qui aurait été versé aux associations étudiantes, selon la preuve énoncée dans la demande qui fait l’objet d’admission, serait de l’ordre de 123 000 $. Par ailleurs, elle mentionne que l’enquête est toujours en court afin d’établir la provenance de certains versements.

[20]        Le procureur des intimés a également fait des représentations afin de préciser certains éléments et donner la version des faits de ses clients.

[21]        Le procureur des intimés est venu réitérer la collaboration et la coopération de ses clients avec l’Autorité.

[22]        Il a également fait mention du registre en expliquant que ceci visait une plus grande transparence et d’éviter toute confusion quant à l’origine des fonds ainsi remis afin d’assurer que le tout se fasse en respect de la loi. Il a fourni un exemple où de telles sommes pourraient être remises à des clients, notamment dans le cas où la fondation de l’intimée ASEQ pourrait financer certains projets étudiants.

[23]        Il a mentionné que ses clients avaient pris ceci au sérieux et souhaitaient régulariser la situation.

[24]        Il a ajouté qu’aucune perte financière n’avait résulté de ces manquements et que l’intimé Allard s’était dûment inscrit avant l’intervention de l’Autorité.

[25]        Lorsque questionné par le Tribunal à savoir si les pénalités administratives de 50 000 $ à l’égard de l’intimée ASEQ et celles de 8 000 $ pour chacun des intimés Allard et Bukhman étaient suffisantes et plus particulièrement celle concernant l’intimé Bukhman ayant eu un rôle et des responsabilités accrus étant, à l’époque, le dirigeant responsable et le seul représentant inscrit au cabinet de l’intimée ASEQ, après avoir consulté son client, le procureur des intimés a convenu de hausser la pénalité administrative à l’égard de l’intimé Bukhman à 12 000 $.

[26]        En conséquence, le Tribunal a demandé s’il était plus opportun, étant donné les différentes demandes de modification à l’entente, de déposer une nouvelle entente qui reprendrait les termes discutés lors de la présente audience.

[27]        Les procureurs des parties ont ainsi demandé au Tribunal d’entériner cette nouvelle entente qui lui serait déposée.

[28]        Durant le délibéré, tel que convenu, la nouvelle entente, ci-jointe à la présente décision, a été déposé au Tribunal le 19 décembre 2016.

 

 

ANALYSE

[29]        Le Tribunal a entendu les représentations des parties, a pris connaissance de la demande, des deux ententes dont la dernière est intitulée « Entente et admissions des intimés » jointe à la présente décision et de l’ensemble des pièces.

[30]        Les intimés ont admis la majorité des faits relatés à la demande de l’Autorité.

[31]        Le Tribunal a retenu que les intimés ont admis avoir commis les manquements suivants :

         L’intimé Allard admet avoir posé des actes réservés à un représentant dûment inscrit dans le cadre de ses interactions avec les 7 associations étudiantes, et ce, durant une période de 7 ans avant d’obtenir en 2012 un certificat de représentant en assurance collective de personnes. Notamment, il admet les gestes suivants :

o   discuter et analyser les besoins des étudiants dans le cadre de la conclusion ou du renouvellement de contrats d'assurance collective;

o   informer des représentants d'associations étudiantes à propos des coûts reliés aux couvertures d'assurance dans le cadre du renouvellement de contrats d'assurance;

o   informer les associations étudiantes à propos des soumissions et des couvertures;

o   discuter du choix de l'assureur à l'occasion de rencontres avec des représentants d'associations étudiantes; et

o   proposer des majorations de la couverture de certains soins pour tenir compte de l'augmentation du coût de la vie et pour bonifier les soins, tout en recommandant de ne pas diminuer les services dans les domaines dentaires, de la vue et de la santé.

         Les intimés reconnaissent :

o   Avoir contrevenu à l'article 12 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers[4] (« LDPSF ») en permettant à l’intimé Allard, avant d’obtenir son certificat de représentant en assurance collective de personnes en février 2012, de poser des actes réservés à un tel représentant sans être certifié auprès de l'Autorité;

o   L'intimée ASEQ a contrevenu aux articles 82, 85 et 86 de la LDPSF en omettant de s'assurer que leur employé, l’intimé Allard, se conforme à son obligation, selon l'article 12 de la LDPSF, de détenir un certificat de représentant en assurance collective de personnes afin de pouvoir poser certains gestes;

o   Aux fins de l'entente, les intimés notent que les sources de provenance des fonds versés aux associations étudiantes en lien avec la prolongation de contrats auraient dû être plus clairement divulguées aux associations étudiantes.

[32]        Le Tribunal est satisfait des représentations faites relativement aux manquements.

Pénalités administratives et interdictions d’agir comme dirigeant responsable

[33]        Concernant les pénalités administratives et les autres ordonnances demandées dans l’entente intervenue entre les parties, le Tribunal doit se demander si elles sont raisonnables afin d’assurer la protection du public[5] . De plus, le Tribunal doit se demander si elles satisfont au critère de dissuasion spécifique et générale[6], considérant les manquements reprochés tout en prenant compte des facteurs aggravants et atténuants de la présente affaire.

[34]        Le Tribunal rappelle d’ailleurs les commentaires de la Cour du Québec dans l’affaire Mizrahi relativement au rôle du Tribunal dans l’analyse d’une suggestion commune soumise par les parties :

« Les règles jurisprudentielles pertinentes

[21]           En matière criminelle, la considération que doit accorder le décideur à des suggestions ou recommandations communes est établie depuis de nombreuses années.

[22]           Plus récemment, en juillet 2006, la Cour d'appel rappelle l'état du droit dans Boucher-Gagnon c. R.:

[…]

[3]  Au Canada, les tribunaux d'appel ont défini à maintes reprises la règle de conduite devant guider le juge qui choisit de ne pas suivre pareille recommandation.  Dans Verdi-Douglas c. R., le juge Fish, alors à notre Cour, l'a exprimée en ces termes :

[42]  Canadian appellate courts have expressed in different ways the standard for determining when trial judges may properly reject joint submissions on sentence accompanied by negotiated admissions of guilt.

[43]  Whatever the language used, the standard is meant to be an exacting one.  Appellate courts, increasingly in recent years, have stated time and again that trial judges should not reject jointly proposed sentences unless they are "unreasonable", "contrary to the public interest", "unfit", or "would bring the administration of justice into disrepute".

[…]

[25]           Comme le résume fort bien Me Éric Vanchestein, il est maintenant bien établi que « le Comité de discipline, à qui une recommandation conjointe est soumise, n'est pas lié par celle-ci et conserve la discrétion d'imposer la sanction qu'il estime raisonnable.  Cette discrétion doit être exercée en respectant certaines règles établies par la jurisprudence lorsque l'on s'apprête à rejeter une suggestion commune en faveur d'une sanction différente.  Le Comité doit en principe donner aux parties l'occasion de lui faire part de leurs observations et exposer aux parties les motifs qui le pousse à ne pas donner suite à la recommandation commune.  En n'informant pas les parties de son intention de ne pas suivre la recommandation conjointe et en les privant de la possibilité d'être entendu, un Comité n'a d'autre choix que de s'en remettre à la recommandation conjointe. » »[7]

[Références omises]

[35]        Cette position a été reprise récemment par la Cour du Québec dans l’affaire Pharand[8] où cette dernière a rappelé qu’il « est usuel en droit administratif d’avoir recours à la jurisprudence en matière pénale ou criminelle pour déterminer les éléments requis pour qu’il y ait contravention à la norme établie par la loi ou le traitement que le Tribunal ou le Comité de discipline doit accorder à une recommandation commune de sanction »[9]. Le rôle du Tribunal n’est pas de substituer la sanction qu’il aurait imposée à la suite d’une audience contestée, mais plutôt d’assurer que les sanctions proposées sont acceptables en fonction des paramètres usuels d’analyse[10].

[36]        Dans un premier temps, le Tribunal considère comme graves les manquements reprochés surtout celui d’avoir effectué le versement de sommes d’argent en contrepartie du renouvellement de polices d’assurance collective de personnes auprès de ces associations étudiantes.

[37]        Ceci constituait assurément un incitatif important pour le renouvellement du contrat d’assurance au bénéfice de l’association étudiante pouvant ainsi mettre en doute le bien-fondé de ce renouvellement. En l’espèce, selon la preuve, 123 000 $ auraient été versés à ces associations étudiantes.

[38]        Il est à noter que les assurés d’un régime d’assurance collective de personnes sont une clientèle captive malgré que ces derniers puissent y renoncer pour adhérer à une autre assurance du même type, ceci n’est pas toujours aussi simple. Il y a des situations où ce n’est pas possible. Le Tribunal souligne à cet égard le passage suivant de la Cour supérieure quant à la position dans laquelle se retrouve un adhérent à une assurance collective :

« [48]           L'assurance collective donne lieu à une relation tripartite entre le preneur, l'assureur et l'adhérent, où les véritables interlocuteurs sont le preneur et l'assureur alors que l’adhérent n’a aucun pouvoir de négociation. Ainsi, le preneur et l’assureur peuvent convenir de changements à la police en tout temps et ces changements sont opposables aux adhérents dès la date convenue par les parties au contrat, sans que l'adhérent n'ait son mot à dire. »[11]

[39]        En matière d’assurance collective de personnes, l’assuré dépend des négociations et des ententes effectuées par un tiers d’où l’importance que ceci soit conclu dans leur intérêt premier sans compensation monétaire. Le Tribunal note à cet égard le passage suivant de la Cour suprême du Canada dans l’affaire Lalonde c. Sun Life du Canada, Cie d’assurance-vie :

« […]  En assurance collective, l’assuré n’a aucun pouvoir de négociation à l’égard du contrat d’assurance-vie. Pour l’assuré il s’agit d’un simple contrat d’adhésion. »[12]

[40]        Le Tribunal a lu l’allégué de l’entente et écouté les représentations des procureurs des parties concernant la création d’un registre pour colliger les sommes versées, entres autres, aux associations étudiantes par l’intimée ASEQ et la déclaration effectuée par les représentants de ces associations afin de valider ces versements. Le Tribunal prend bonne note qu’il y est mentionné que ces versements devront se faire dans les paramètres permis par la loi, il ne doit pas s’agir, notamment, de rabais de primes et de partage de commissions.

[41]        Le Tribunal a également entendu les représentations du procureur des intimés relativement aux circonstances pouvant amener une contribution financière du cabinet, l’intimée ASEQ, aux activités de ces associations étudiantes.

[42]        Le Tribunal considère que cette ligne est infiniment mince entre ce qui est interdit par la loi et les situations pouvant le permettre.

[43]        Malgré qu’on nous ait fait valoir que la contribution monétaire serait faite par la fondation de ce cabinet, dont nous ne connaissons pas les paramètres légaux, il ne faut pas permettre de faire indirectement ce qui est interdit de faire directement. Il est difficile de dissocier cet apport financier à l’expectative commerciale d’obtenir la continuité du partenariat d’affaires.

[44]        Le Tribunal conçoit qu’il reviendra à l’Autorité de faire une surveillance étroite de ces versements monétaires aux associations étudiantes ou autres clients de ce cabinet, afin d’assurer la protection des consommateurs.

[45]        De plus, il faut considérer le manquement de l’intimé Allard d’avoir pratiqué des actes réservés à un représentant en assurance collective de personnes sans être certifié auprès de l’Autorité et surtout, pour l’intimée ASEQ à titre de cabinet ainsi que l’intimé Bukhman à titre de dirigeant responsable et seul représentant dûment certifié pour ce cabinet, d’avoir permis et toléré cette situation durant une période de 7 ans. Ceci est très préoccupant sachant qu’il s’agit de responsabilités importantes pour assurer la protection des consommateurs.

[46]        Par ailleurs, le Tribunal retient que les intimés ont collaboré, qu’une entente est intervenue et qu’aucune audience ne fut requise. De plus, la reconnaissance des manquements est signe de contrition permettant de croire au pouvoir de dissuasion spécifique envers les intimés.

[47]        Par ailleurs, le Tribunal a de la difficulté à retenir les critères à l’effet qu’aucune plainte n’aurait été formulée et qu’aucune perte n’aurait été créée. Il est très difficile dans ce contexte de détecter de la part des assurés l’existence d’une telle rétribution faite lors de l’émission ou du renouvellement du contrat d’assurance. Également, ils sont rarement informés des personnes impliquées dans la négociation.

[48]        De plus, il est difficile de déterminer si une perte a eu lieu pour les consommateurs. Les termes du contrat et la couverture de l’assurance collective ont-ils été négociés au seul bénéfice des assurés. Ceci peut créer un doute. Par ailleurs, l’Autorité ne l’a pas démontré.

[49]        En conséquence, le Tribunal préfère ne pas se prononcer et ne les considèrent pas comme facteur atténuant ou aggravant.

[50]        Le fait que les intimés se sont régularisés avant même que l’Autorité n’intervienne, ne saurait en soi convaincre le Tribunal. Toute personne doit respecter en tout temps la législation. De plus, les manquements se sont déroulés sur plusieurs années avant que la situation ne soit conforme.

[51]        En soupesant l’ensemble des faits, le Tribunal conclut que les pénalités administratives convenues lui apparaissent clémentes à l’égard de l’intimée ASEQ, mais dans la limite du raisonnable dans les circonstances, tout en répondant au principe de dissuasion spécifique et générale.

[52]        Relativement aux intimés Allard et Bukhman, considérant la révision de l’entente afin de revoir à la hausse la proposition de pénalité administrative à l’égard de l’intimé Bukhman de 8 000 $ à 12 000 $, le Tribunal est prêt à entériner ces pénalités administratives et les ordonnances demandées étant accompagnées d’une interdiction de ne pas agir à titre de dirigeant responsable. Ce délai d’interdiction de deux ans est court, mais raisonnable[13].

[53]        Le Tribunal a également considéré la jurisprudence pertinente[14] pour déterminer que le quantum des pénalités suggérées était raisonnable eu égard aux différents manquements et aux critères de détermination de celles-ci[15].

[54]        Le Tribunal convient également d’entériner les modalités de paiement demandées.

[55]        En conséquence, le Tribunal entérine ladite entente et impose les pénalités administratives tel que convenu entre les parties dans l’entente, étant faite en général dans l’intérêt public et prononce les autres ordonnances demandées.

DÉCISION

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF DES MARCHÉS FINANCIERS, en vertu des articles 93 et 94 de la Loi sur l’Autorité des marchés financiers[16] et des articles 115, 115.1 et 115.9 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers[17] :

ENTÉRINE l’entente intitulée « Entente et admissions des intimés » signée par les parties les 16 et 19 décembre 2016 et ORDONNE aux parties de s’y conformer;

IMPOSE à l’encontre de Alliance pour la santé étudiante au Québec inc. une pénalité administrative de 50 000 $, payable en un seul versement dans les 10 jours de la présente décision;

IMPOSE à l’encontre de Lev Bukhman une pénalité administrative de 12 000 $, payable en un seul versement dans les 10 jours de la présente décision;

IMPOSE à l’encontre de Patrice Allard une pénalité administrative de 8 000 $, payable en un seul versement dans les 10 jours de la présente décision;

ORDONNE à Alliance pour la santé étudiante au Québec inc. de procéder à la mise en place de mesures de contrôle et de surveillance nécessaires aux fins de se conformer à la LDPSF et à ses règlements, soit de :

 

      i.        Créer un poste de chef de la conformité et des opérations, dont le responsable occupera également la fonction de dirigeant responsable;

 

    ii.        Tenir un registre de toutes les sommes versées à sa clientèle, y compris aux associations étudiantes, étant étendu qu’aucun rabais de prime ni partage de commission avec ces dernières n’est permis.  Seront classées à ce registre les déclarations, signées par les représentants des clients qui préciseront les dates, les montants, la provenance des sommes et leur justification;

 

INTERDIT à Lev Bukhman d’agir, directement ou indirectement, à titre de dirigeant responsable de tout cabinet d’assurances, et ce, pour une période de deux (2) ans;

ASSORTIT le certificat portant le numéro 105564 émis au nom de Lev Bukhman de la restriction suivante : le représentant doit être rattaché à un cabinet dont il n'est pas le dirigeant responsable, et ce, pour une période de deux (2) ans;

INTERDIT à Patrice Allard d’agir, directement ou indirectement, à titre de dirigeant responsable de tout cabinet d’assurances, et ce, pour une période de deux (2) ans;

ASSORTIT le certificat portant le numéro 195324 émis au nom de Patrice Allard de la restriction suivante : le représentant doit être rattaché à un cabinet dont il n'est pas le dirigeant responsable, et ce, pour une période de deux (2) ans.

 

 

 

 

 

 

 

 

__________________________________

Me Lise Girard, présidente

 

 

 

Me Sylvie Boucher

 

(Contentieux de l’Autorité des marchés financiers)

 

Procureure de l’Autorité des marchés financiers

 

 

 

Me Gabriel Querry

 

(McCarthy Tétrault s.e.n.c.r.l., s.r.l.)

 

Procureur de Alliance pour la santé étudiante au Québec Inc., Lev Bukhman et Patrice Allard

 

 

 

 

 

Date d’audience :

Le 15 décembre 2016.

 








[1]     Loi concernant principalement la mise en œuvre de certaines dispositions du discours sur le budget du 26 mars 2015, L.Q. 2016, c.7, art. 171 à 180 par le truchement de l’article 225, al. 1, par. 3.

[2]     Dans les paragraphes subséquents, l’expression « Tribunal » est substituée à l’expression « Bureau », et ce, même lorsque l’on réfère à un fait survenu antérieurement au 18 juillet 2016.

[3]     Autorité des marchés financiers c. Assurance Accomodex inc., 2015 QCBDR 149; Autorité des marchés financiers c. Rochefort, Perron, Billette et Associés inc., 2015 QCBDR 18; Autorité des marchés financiers c. Avro services de gestion de risques inc., 2012 QCBDR 139.

[4]     RLRQ, c. D-9.2.

[5]     Mizrahi c. Autorité des marchés financiers, 2009 QCCQ 10542.

[6]     Cartaway Resources Corp. (Re), [2004] 1 R.C.S. 672.

[7]     Mizrahi c. Autorité des marchés financiers, préc., note 5.

[8]     Pharand c. Autorité des marchés financiers, 2016 QCCQ 9609.

[9]     Id., par. 75.

[10]    Autorité des marchés financiers c. Dionne, 2010 QCBDR 75 citant l’affaire Rankin (Re), (2008), 31 OSCB 3303.

[11]    Fortier c. Sun Life du Canada, compagnie d'assurance-vie, 2010 QCCS 4923.

[12]    Lalonde c. Sun Life du Canada, Cie d’assurance-vie, [1992] 3 R.C.S. 261.

[13]    Autorité des marchés financiers c. Invico Investissements, 2016 QCTMF 49; Autorité des marchés financiers c. Lajeunesse, 2016 QCBDR 15; Autorité des marchés financiers c. Denis Blondeau Assurances inc., 2015 QCBDR 150; Autorité des marchés financiers c. Assurance Accomodex inc., 2015 QCBDR 149; Autorité des marchés financiers c. Groupe Mathieu Turgeon inc., 2015 QCBDR 41

[14]    Autorité des marchés financiers c. Rochefort, Perron, Billette et Associés inc., préc., note 3; Autorité des marchés financiers c. Avro services de gestion de risques inc., préc., note 3.

[15]    Autorité des marchés financiers c. Cailloux, Dagort et Associés inc., 2011 QCBDR 96.

[16]    RLRQ, c. A-33.2.

[17]    Préc., note 4.

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