Commission des services financiers de l'Ontario

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                         Surintendant of                                                        Surintendant des

                        Financial                                                                   services

                        Services                                                                     financiers     

 

___________________________________________________________________________

 

AB 148-2014

 

RELATIVEMENT À la Loi sur les assurances, L.R.O. 1990, chap. I-8, telle que modifiée (ci-après la « Loi »), en particulier les paragraphes 393(9) à 393(11) de la partie XIV;

 

ET RELATIVEMENT à une audience concernant la suspension ou la révocation du permis d’agent d’assurance-vie de Jeffrey Murray Willis (ci-après « M. Willis »).

 

DÉCISION ET ORDONNANCE

 

 

Introduction

 

M. Jeffrey Murray Willis a demandé une audience après que lui eut été signifié, le 6 octobre 2014, l’avis de possibilité de demander une audience relativement à la suspension ou à la révocation de son permis d’agent d’assurance-vie (ci-après le « permis d’agent d’assurance »). Une audience devant un comité consultatif (ci-après le « comité ») a eu lieu le 16 octobre 2014, le 19 février 2015 et le 23 avril 2015. M. Willis y a assisté et a témoigné lors de l’audience. Le permis d’agent d’assurance de M. Willis est suspendu pour une période de neuf (9) mois et ce permis est assorti de conditions imposées pour une période supplémentaire de vingt-quatre (24) mois.

 

Présentation

 

Le 6 octobre 2014, le surintendant des services financiers (ci-après le « surintendant ») a signifié un avis d’audience (ci-après « l’avis ») à M. Willis. Dans cet avis, M. Willis a été informé de la constitution d’un comité appelé à se pencher sur les allégations qui le concernent, sur sa réputation, de même que sur sa bonne conduite et sa compétence.  

Aux termes de l’avis d’audience, un comité a été dûment constitué en vertu du paragraphe 393(9) de la Loi. L’audience, qui a eu lieu le 16 octobre 2014, le 19 février 2015 et le 23 avril 2015, s’est faite par voie d’exposé conjoint des faits et par mémoire conjoint.

Une copie des allégations est jointe en annexe à la présente décision.

Une copie du rapport du comité est également jointe à la présente.

Conclusions de faits

M. Willis était titulaire d’un permis d’agent d’assurance depuis 1994. Le 13 décembre 2013, M. Willis a soumis une demande par Internet afin que ce permis d’agent d’assurance soit renouvelé. Dans cette demande de renouvellement :

         il a répondu, à la question 13 du formulaire de demande, qu’une amende lui avait été imposée par l’Association canadienne des courtiers de fonds mutuels (ACCFM) et avait été par la suite empêché de joindre cette association professionnelle;

         il a répondu, à la question 15 du formulaire de demande, qu’il avait été poursuivi avec succès dans le cadre de la poursuite au civil qui l’a opposé à la fiducie familiale NF (NF Family Trust) et a fait mention du règlement qui a découlé de cette instance; 

         il a répondu, à la question 17 du formulaire de demande, qu’il avait été libéré d’une faillite. Il a déposé une cession de faillite le 18 août 2011 et est devenu failli libéré le 30 mai 2013.

Cinq allégations ont été formulées à l’endroit de M. Willis concernant sa conduite dans le cadre d’activités liées aux valeurs mobilières, sa compétence et sa collaboration dans le cadre d’un examen par le surintendant. M. Willis a témoigné lors de l’audience. 

Le comité a constaté que lors de l’interrogatoire de M. Willis le 6 mars 2014, l’enquêteur de la CSFO a précisé clairement à M. Willis qu’il était dans l’obligation de fournir les noms de ses clients à la Commission. À la fin de l’interrogatoire, M. Willis n’avait toujours pas fourni à l’enquêteur l’information demandée. Le comité a toutefois noté que l’enquêteur de la CSFO n’a pas donné de précisions quant aux échanges de courriels suivant l’interrogatoire et cela les a amenés à conclure que M. Willis n’est pas incontrôlable (paragraphe [86] du rapport du comité).

Le comité était d’avis que M. Willis, pour son propre intérêt financier, a sciemment facilité l’investissement de ses clients dans des produits financiers non approuvés par son courtier et que ces investissements ont occasionné des pertes considérables pour ses clients. Le comité a aussi souligné que M. Willis a tiré profit de la vente de produits d’investissement non approuvés à un certain nombre de clients et a, par conséquent, profité de ces clients. 

Le comité a constaté qu’il apparaît clairement que M. Willis a enfreint les règles déontologiques de l’ACCFM. Il était tout aussi clair pour le comité que ces infractions ont entraîné des préjudices pour ses clients. Le fait que M. Willis ait lui aussi perdu de l’argent n’affecte en rien les pertes subies par ses clients. Le comité a aussi relevé que M. Willis était représenté par un avocat lors des audiences de l’ACCFM et que M. Willis n’a pas interjeté appel ni demandé la révision judiciaire des conclusions de l’ACCFM.

Le comité consultatif a accepté les conclusions de la procédure réglementaire intentée par l’ACCFM. Il souligne que permettre la réouverture des questions étudiées de manière concluante par la Cour ou par un tribunal administratif constituerait un abus de procédures.   

Le comité était d’avis que l’instance de l’ACCFM est pertinente dans le cadre de la demande de permis d’agent d’assurance de M. Willis. M. Willis a pris connaissance de l’exposé conjoint des faits de l’ACCFM et a admis les faits contenus dans ce document, bien qu’il n’ait admis que deux des trois allégations à son endroit. Il a également admis que ces faits constituent une faute professionnelle. Il ne s’est pas opposé aux recommandations du personnel de l’ACCFM relativement à d’éventuelles sanctions. L’ACCFM a ordonné une radiation à vie, des amendes et des coûts à l’endroit de M. Willis.

Selon le rapport du comité (paragraphe [74]), il semble que M. Willis avait été poursuivi par un certain nombre de défendeurs relativement à des investissements non approuvés et cette poursuite s’était conclue par le paiement de 150 000 $ par M. Willis et par un paiement de la part de son courtier.

Bien que le comité n’ait pas jugé que M. Willis était incontrôlable, le comité a néanmoins conclu que M. Willis était inapte à détenir un permis (paragraphe [110] du rapport du comité).

J’adopte donc par les présentes les conclusions de faits du comité consultatif.

 

Recommandation du comité consultatif

Le comité déclare être unanime dans ses conclusions concernant les allégations; le comité est toutefois divisé quant à ses recommandations (paragraphe [111] du rapport du comité).

La majorité des membres du comité a recommandé ce qui suit :

a.    la suspension du permis d’agent d’assurance de M. Willis pour une période d’un an;

b.    une fois échue cette période de suspension d’un an :

                      i.        M. Willis sera supervisé pour une période d’un an;

                    ii.        M. Willis devra préparer pour la Commission des rapports trimestriels :

1.    livrant les détails de ses activités d’agent d’assurance durant le trimestre concerné, y compris les détails de toute vente d’assurance au cours de ce trimestre;

2.    confirmant que les interactions avec ses clients ont été supervisées;

c.    Au cours de l’année de la suspension de son permis, M. Willis devra s’inscrire et suivre un cours lié au domaine de l’assurance sur au moins un des sujets suivants :

                      i.        un cours de déontologie approuvé par la Commission;

                    ii.        un cours d’assureur-vie agréé (AVA);  

d.    M. Willis assistera également aux rencontres trimestrielles d’ADVOCIS pour une période d’au moins un an. 

Pour rendre sa décision relativement à la possibilité de révocation du permis d’agent d’assurance de M. Willis, la majorité des membres du comité a pris en compte les éléments d’appréciation suivants :

a.    La preuve de sa bonne réputation, preuve notamment corroborée par son pasteur;

b.    La preuve de son employeur actuel, qui dit avoir confiance en lui;

c.    Le fait que M. Willis œuvre depuis 20 ans dans l’industrie de l’assurance;

d.    L’absence de toute autre préoccupation soulevée depuis que les questions ont été évoquées lors de l’instance de l’ACCFM, qui remontent à septembre 2008-2009;  

e.    Le tribut payé par M. Willis à ce jour, y compris l’opprobre associé aux constatations de l’ACCFM à son endroit.

La recommandation de la minorité des membres du comité est que le permis d’agent d’assurance de M. Willis soit révoqué.

Pour rendre sa décision concernant la révocation du permis d’agent d’assurance de M. Willis, cette minorité de membres a pris en compte les éléments d’appréciation suivants :

a.    L’instance de l’ACCFM a clairement établi que M. Willis a facilité l’investissement, par 32 clients et par d’autres, dans des produits financiers non approuvés, à l’encontre des règles de l’ACCFM;

b.    À la suite de ces investissements, ces clients ont perdu des sommes d’argent considérables;

c.    M. Willis a aussi contracté une dette de 150 000 $ auprès d’un client, ce qui est contraire aux règles de l’ACCFM;

d.    Le fait que M. Willis a sciemment fait courir un risque à ses clients avec des produits financiers qu’il savait ne pas être approuvés et a tiré profit de cette situation démontre qu’il est inapte à détenir un permis d’agent d’assurance; 

e.    Cette recommandation surpasse la sanction suggérée par la Commission.

 

Décision

Le comité a constaté que M. Willis a divulgué, dans sa demande de renouvellement de permis d’agent d’assurance-vie, la sanction imposée par l’ACCFM. Le comité a donc recommandé une période de suspension, des cours et un certain nombre d’autres conditions rattachées à son permis. 

J’ai tenu compte des commentaires du comité voulant que M. Willis ait collaboré, qu’il fait carrière dans l’assurance depuis 20 ans, qu’il avait la confiance de son employeur actuel et qu’il avait pris certaines mesures de dédommagement. S’il n’avait pas agi ainsi, la sanction aurait été beaucoup plus sévère. 

Il y a deux questions à trancher en l’espèce. La première question est de déterminer dans quelle mesure les conclusions relatives à l’inaptitude rendues par un organisme de réglementation des services financiers autres que d’assurance devraient être prises en compte aux fins de la détermination de l’inaptitude à détenir un permis d’agent d’assurance. La deuxième concerne toute infraction à la Loi sur les assurances découlant de toute autre question, par exemple un défaut de coopérer avec le surintendant[1].

Les principes de l’affaire Nerdahl[2] traitent des mesures disciplinaires imposées par un autre organisme de réglementation (domaine autre que les assurances) lors d’une instance en vertu de la Loi :

  1. Si l’instance introduite aux termes de la Loi permet de conclure que l’agent n’est pas apte, alors celui-ci ne satisfait pas aux exigences énoncées au paragraphe 393 de la Loi aux fins de la détention d’un permis.
  2. Si l’instance introduite aux termes de la Loi permet de conclure que l’agent est apte à détenir un permis en vertu de ladite Loi, il est alors nécessaire de s’assurer que celui-ci n’aura pas un mauvais comportement dans la conduite de ses activités. À cette fin, on peut envisager l’imposition de conditions de permis et une suspension du permis.
  3. Si l’instance introduite aux termes de la Loi permet de conclure que l’agent est apte à détenir un permis en vertu de ladite Loi, l’imposition de toute sanction doit s’inscrire expressément dans le cadre des responsabilités incombant au surintendant aux termes de la Loi sur les assurances. Cela ne change en rien la gravité des mesures disciplinaires imposées par d’autres organismes de réglementation.

En conséquence, les mesures disciplinaires imposées par un autre organisme de réglementation ne sont pas le seul élément déterminant de toute mesure de même nature susceptible d’être imposée en vertu de la Loi. Chaque affaire doit être examinée en fonction des faits qui lui sont propres, ce qu’une minorité de membres du comité a souligné en l’espèce (paragraphe [136] du rapport du comité)[3].

L’affaire Nerdahl soulève des éléments d’appréciation supplémentaires, qui sont résumés ci-dessous. Il est raisonnable de croire qu’il y a risque de préjudice pour le public à la suite de l’utilisation, par M. Willis, de produits non approuvés alors qu’il œuvrait dans le domaine des fonds communs de placement, nonobstant qu’il n’existe aucun élément de preuve confirmant que des clients du domaine de l’assurance ont subi un préjudice. Si M. Willis avait répondu à l’enquête légitime de l’enquêteur de la CSFO, le tout aurait pu être confirmé. Néanmoins, ces questions sont décrites ci-après. 

Il est possible qu’une conclusion formulée par un autre organisme de réglementation dans un domaine autre que l’assurance au sujet de l’honnêteté et de l’intégrité d’une personne amène un comité à conclure que cette personne est encline à avoir un tel comportement et qu’elle représente un risque inacceptable pour le public, ou qu’un seul agissement par cette personne est à ce point grave que cette personne ne possède pas les aptitudes requises pour être un agent d’assurance. Le cas échéant, la personne serait jugée inapte à détenir un permis d’agent d’assurance. Le comité n’a pas conclu à l’existence de l’une ou l’autre de ces circonstances en l’espèce (paragraphe [124] du rapport du comité). Toutefois, seule une minorité de membres du comité a estimé que la révocation constitue une mesure appropriée. 

Il est également possible qu’un comité consultatif, en tenant compte des antécédents de l’agent au sein de l’industrie de l’assurance et de ses antécédents dans le domaine des services financiers, en vienne à la conclusion que le risque pour le public est précisément lié aux services financiers autres que d’assurance et qu’il est possible de gérer le risque que ce comportement se reproduise. Une telle conclusion n’équivaudrait pas à fermer les yeux sur l’action commise par la personne, ou à amoindrir les conclusions de la majorité des membres du comité en l’espèce (paragraphe [116] du rapport du comité).

Dans son rapport, le conseil consultatif a clairement déterminé, à raison, que le fait de conclure que M. Willis est inapte devrait raisonnablement donner lieu à une révocation de son permis. En vertu de l’article 393 de la Loi, la délivrance d’un permis d’agent d’assurance est conditionnelle au fait que la personne est apte à recevoir un tel permis, et il appartient au surintendant d’évaluer cette aptitude.

L’article 407 de la Loi sur les assurances stipule qu’« un permis peut être délivré à un agent ou à un expert d’assurance sous réserve des restrictions et des conditions que le surintendant ou l’organisme reconnu en vertu du paragraphe 393(14), selon le cas, peut prescrire ». Les restrictions ou les conditions visent à contrôler le risque lorsque celui-ci peut l’être de manière concrète. Il peut s’agir de situations nécessitant une plus grande supervision des agissements d’un agent afin d’assurer la protection du public. La majorité des membres du comité semble avoir évalué ainsi cette situation.

Il ne faudrait pas oublier qu’une personne ayant contrevenu au règlement régissant la vente de produits financiers autres que d’assurance demeure titulaire d’un permis de vente d’assurance (autre produit financier) au public. Cela est particulièrement vrai lorsque des fonds communs entrent en concurrence avec des produits d’assurance. Toute personne assujettie à la réglementation doit connaître les règles régissant les services financiers et s’y conformer[4]. En l’espèce, l’instance de l’ACCFM avait trait à des investissements non approuvés, et non à des produits de fonds communs. 

Cela dit, le régime de réglementation des assurances doit être à la fois équitable et commode à appliquer. Le caractère équitable comporte deux aspects. D’une part, des infractions semblables à la Loi devraient se traduire par des conséquences semblables. Une telle certitude favorise la conformité à la Loi et facilite son application. D’autre part, en ce qui touche le caractère équitable, il faut également tenir compte de ce qui est nécessaire pour entraîner chez le particulier un changement de comportement et de ce qui est nécessaire pour pénaliser les actes répréhensibles, tant en matière de dissuasion spécifique qu’en matière de dissuasion générale[5]. Par conséquent, il faut imposer une sanction en rapport avec l’infraction au titre du paragraphe 443(1) (disposition générale relative aux examens) afin qu’il soit bien clair pour l’industrie que toute personne titulaire d’un permis ou qui l’a été, en vertu de la Loi, a l’obligation de préparer et de présenter à la personne chargée de l’examen toute information concernant ses activités commerciales, ses finances ou ses autres activités, comme pourrait l’exiger le surintendant[6].

Je suis d’accord avec le point de vue du comité voulant que M. Willis ne soit pas inapte parce qu’il a négligé de faciliter un examen. Je crois que l’enquêteur de la CSFO, le 28 mars 2014, a informé M. Willis du fait qu’il n’avait pas d’autre demande (paragraphe [58] du rapport du comité), et ce, même si M. Willis n’avait pas répondu à sa demande initiale. M. Willis ne devrait pas être réputé incontrôlable parce qu’il a demandé des précisions sur le conseil de son avocat. Même si l’enquêteur aurait dû répondre aux demandes ultérieures de M. Willis, le comportement de M. Willis à la suite de la demande initiale légitime de l’enquêteur pour faciliter son examen aura une influence dans l’évaluation finale de cette cause.

La majorité des membres du comité n’a pas estimé que les ordonnances de l’ACCFM étaient suffisantes pour en arriver à la conclusion que M. Willis était inapte à détenir un permis d’agent d’assurance en vertu de la Loi.

M. Willis n’a pas pris part à l’instance devant l’ACCFM. Le comité a souligné que M. Willis pourrait maintenant manifester des remords relativement à la façon dont il s’est conduit lors de l’instance devant l’ACCFM; il demeure toutefois lié par cette instance (paragraphe [102] du rapport du comité). L’instance de l’ACCFM a entraîné une radiation permanente à l’égard de sa capacité à exercer des activités liées aux valeurs mobilières, et M. Willis s’est vu imposer une amende de 35 000 $ et une condamnation aux dépens de l’ordre de 2 500 $. Le comité ne disposait d’aucune indication voulant que M. Willis connaisse la décision concernant l’amende et l’octroi des dépens. Il serait inapproprié pour un autre organisme de réglementation des services financiers de l’ignorer.

J’ai tenu compte du fait que le secteur des assurances repose sur un principe d’une bonne foi absolue et qu’un aspect essentiel de ses activités consiste à faire de l’intérêt du client une priorité absolue. Il apparaît clairement que M. Willis a sciemment placé ses clients en situation de risque en raison d’investissements non approuvés et qu’il a profité substantiellement de cette situation, malgré ses tentatives d’atténuer de telles pertes. Bien que le comité ait jugé que M. Willis était inapte, une minorité de membres du comité a recommandé la révocation de son permis. 

Le comité consultatif a recommandé un cours de déontologie en réponse à sa première conclusion afférente à l’instance devant l’ACCFM. C’est le défaut de M. Willis de prendre les mesures exigées par son courtier pour surveiller les répercussions des investissements avec levier financier qui ont entraîné les mesures réglementaires de l’ACCFM. Je ne suis pas convaincu qu’un cours d’assureur-vie agréé ou que la participation à des rencontres d’une association de l’industrie soient une solution efficace pour contrer les risques associés à la recommandation de produits d’assurance.   

Compte tenu des conclusions du comité, j’estime que les conclusions du permis prévoyant la supervision et la surveillance de M. Willis sont nécessaires pour s’assurer que les infractions commises par celui-ci constituent des gestes isolés qui se limitent au seul domaine de valeurs mobilières et que celles-ci ne représentent pas un risque pour les clients du domaine de l’assurance. Je vais donc ordonner une période de supervision, ainsi qu’une formation en déontologie, un suivi concernant l’assurance erreurs et omissions ainsi que des conditions plus strictes que ce que la majorité des membres du comité ont recommandé pour contrer les risques et les comportements précédemment décrits.   

L’unanimité du comité quant à ses conclusions concernant l’inaptitude de M. Willis, mais la division de ses membres à l’égard de la recommandation confirme que pour rendre ma décision, je dois m’appuyer plus largement sur les principaux précédents impliquant des sanctions par d’autres superviseurs des services financiers[7].

La volonté de M. Willis de donner préséance à ses propres intérêts sur ceux de ses clients requiert une supervision plus étroite du surintendant afin de s’assurer que toute faute professionnelle liée aux valeurs mobilières ne se traduise pas par l’équivalent pour la vente d’assurances. Il serait impossible de réglementer le secteur si le défaut de faire une priorité de l’intérêt des clients ne s’accompagnait pas de conséquences graves pour les titulaires de permis.

Le comité a recommandé une sanction se situant à la limite supérieure des suspensions déjà imposées par le surintendant en l’espèce. Les décisions antérieures du surintendant ont habituellement entraîné des suspensions pour moins d’un an. L’objet de la sanction pour une infraction à la Loi sur les assurances, dans le cas qui nous occupe, est le défaut pour une personne titulaire ou ayant été titulaire d’un permis d’agent d’assurance en vertu de la Loi, de préparer et de présenter à la personne chargée de l’examen toute information concernant ses activités commerciales, ses finances ou ses autres activités comme pourrait l’exiger le surintendant. Je conviens qu’il devrait effectivement y avoir sanction, mais je ne suis pas prêt à accepter une période de 12 mois comme le recommande la majorité des membres du comité; cette infraction ne requiert pas non plus la révocation du permis, comme le recommande une minorité de membres du comité.   

Les facteurs atténuants sont le soutien offert par son employeur à M. Willis et les efforts déployés par celui-ci pour atténuer les pertes de ses clients, comme le résume le comité dans son rapport. Il semble également que dans le cadre de l’emploi qu’il occupe aujourd’hui, M. Willis travaille avec des courtiers en ce qui concerne la planification successorale et d’autres fonctions de consultation. Ses responsabilités sont décrites comme des fonctions de soutien essentiellement, mais dans les faits, M. Willis rencontre des clients.

J’ai constaté que M. Willis avait agi selon son propre intérêt et non dans l’intérêt de ses clients ni en conformité avec la loi. Le fait que M. Willis ait contrevenu à la Loi et la façon dont il a agi avant de le faire, bien davantage que la nature même des investissements, justifient de telles conclusions.

ORDONNANCE

J’ordonne par les présentes la suspension suivante et l’imposition de conditions relativement au permis d’agent d’assurance-vie de Jeffrey Murray Willis :

  1. Le permis d’agent d’assurance-vie de M. Willis sera suspendu pour une période d’au moins neuf mois, à compter du 15 février 2016; 
  2. M. Willis devra suivre un cours en déontologie professionnelle approuvé par le surintendant dans les quatre (4) mois suivant la date de la présente ordonnance. Ce cours ne doit pas être admissible à des crédits de formation continue.
  3. Sous réserve du point 5 ci-dessous, le permis d’agent d’assurance de M. Willis sera suspendu jusqu’à la dernière des dates suivantes : à la fin de la période de suspension imposée au point 1 ou à la date à laquelle M. Willis fournira au surintendant, par écrit, les confirmations suivantes :
    1. De l’ACCFM : la conclusion d’une entente écrite concernant le paiement des dépens se chiffrant à 2 500 $ et des amendes totalisant 35 000 $ ayant fait l’objet d’une ordonnance le 1er juin 2012, et que ces montants ont bel et bien été payés;
    2. D’une société d’assurance acceptable selon le surintendant : une preuve écrite que M. Willis a souscrit une assurance erreurs et omissions conformément à la Loi pour un agent d’assurance dans les circonstances qui sont les siennes; 
    3. Du fournisseur de la formation en déontologie tel que mentionné au point 2, ci-dessus, la preuve que M. Willis a suivi et réussi une telle formation dans les délais indiqués.
  1. M. Willis devra :
    1. s’abstenir de travailler comme agent d’assurance-vie, sauf pour la firme Strategic Alliance Finance Group, bureau 201, 3 Director Court, Vaughan (Ontario)  L4L 4S5, à moins d’y être autrement autorisé par le surintendant;
    2. aviser le surintendant de manière immédiate, par écrit, s’il fait l’objet de toute instance par un organisme de réglementation ou d’agrément concernant tout permis dont elle est titulaire ou dont elle pourrait être titulaire et qui lui est nécessaire pour travailler auprès du public;

c.    aviser le surintendant de manière immédiate, par écrit, s’il est accusé d’une infraction dans une province ou un pays, quels qu’ils soient.

  1. Le permis d’agent d’assurance de M. Willis demeurera suspendu jusqu’à la dernière des dates suivantes : à l’échéance de la période de suspension ordonnée au point 1, ci-dessus, ou à la date à laquelle M. Willis recevra du surintendant l’autorisation écrite approuvant l’engagement écrit d’un autre agent (ci-après « l’agent superviseur »), celui-ci étant un agent autorisé à exercer en Ontario accepté par le surintendant et qui s’engage, pendant une période de vingt-quatre (24) mois débutant à la date d’expiration de la suspension du permis de M. Willis, à :
    1. Superviser M. Willis et cosigner toutes les propositions d’assurance à titre de responsabilité conjointe pour les affaires d’assurance traitées par M. Willis;
    2. Confirmer que M. Willis n’a pas eu accès aux fonds ou aux comptes des titulaires de police, et n’a pas facilité l’octroi de prêts sur quelque police ni facilité quelque investissement que ce soit;
    3. Confirmer qu’une assurance erreurs et omissions est souscrite et maintenue en permanence;
    4. Signaler immédiatement au surintendant toute infraction à la Loi sur les assurances et à ses règlements que commettrait M. Willis;  
    5. Préparer promptement, tous les six (6) mois durant la période de supervision, un rapport sur les affaires d’assurance souscrites par M. Willis, sur les autres exigences qui lui sont imposées et sur la conformité de celui-ci, et remettre ce rapport au surintendant.
  2. Si l’agent superviseur ne souhaite plus assumer ses responsabilités de supervision, M. Willis doit en aviser immédiatement le surintendant. Il est interdit à M. Willis de mener ses activités d’agent d’assurance sans agent superviseur.
  3. S’il désire remplacer l’agent superviseur, M. Willis doit en aviser le surintendant sans délai; et il lui est interdit de mener ses activités d’agent d’assurance jusqu’à ce qu’il reçoive l’autorisation écrite du surintendant approuvant l’agent superviseur retenu en remplacement conformément au point 5 ci-dessus.

 

 

 

FAIT À Toronto (Ontario), le                                                                              2016.

 

 

 

 

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Anatol Monid

Division de la délivrance des permis et de la surveillance des pratiques de l’industrie

En vertu des pouvoirs délégués par le
surintendant des services financiers

 

 


Annexe

 

 

Les allégations suivantes ont été énoncées dans l’avis :

 

La Commission des services financiers de l’Ontario (ci-après la « CSFO ») estime que le permis d’agent d’assurance de Jeffrey Murray Willis (ci-après « M. Willis ») devrait être suspendu ou révoqué en fonction des allégations suivantes, dont les détails sont précisés séparément.

 

Allégations

 

1.    M. Willis est inapte à détenir un permis d’agent d’assurance, car il a fait preuve d’incompétence et s’est montré peu fiable dans la conduite des activités d’agent d’assurance pour lesquelles son permis lui a été délivré en vertu de l’article 8(d) du Règlement de l’Ontario 347/04. Il a aussi démontré qu’il est incontrôlable en vertu du paragraphe 443(1) de la Loi.

 

2.    M. Willis n’est pas de bonnes mœurs et de bonne réputation, comme l’exige l’article 4(1)a) du Règlement de l’Ontario 347/04.

 

3.    M. Willis a été sanctionné par l’Association canadienne des courtiers de fonds mutuels (ACCFM) pour diverses activités survenues entre février 2005 et mai 2009, lesquelles étaient contraires aux règles déontologiques de l’ACCFM. Le 1er juin 2012, l’ACCFM a imposé une interdiction définitive et permanente à M. Willis d’exercer des activités liées aux valeurs mobilières en étant à l’emploi ou associé avec un membre de l’ACCFM quel qu’il soit et lui a imposé une amende de 35 000 $ et des dépens de 2 500 $. 

 

4.    M. Willis a été cité comme défendeur dans une demande introductive d’instance déposée devant la Cour supérieure de l’Ontario par Mme N. F., veuve âgée de 78 ans, pour préjudices par négligence, assertion négligente et inexacte, rupture de contrat, abus de confiance, enrichissement injustifié et violation de devoir de fiduciaire totalisant 4 millions de dollars pour des activités liées à des investissements non autorisés de fonds d’assurance et de valeurs mobilières. Le règlement de cette poursuite comprenait une indemnisation à la plaignante par l’assurance erreurs et omissions de M. Willis. 

 

5.    Tout autre motif qui pourrait être justifié.

 



[1] Harvey c. Ontario (surintendant des services financiers), 2014 AB 115-2013 (« Harvey »).

[2] Nerdahl c. Ontario (surintendant des services financiers), 2013 AB 100-2012 (« Nerdahl »).

[3] Vorstadt c. Ontario (surintendant des services financiers), 2014 AB 117-2013 (« Vorstadt »).

[4] Harvey

[5] Hilderman c. Ontario (surintendant des services financiers), 2013 AB 110-2012 (« Hilderman »).

[6] Ordonnance de suspension, Sabourin, Richard – 20 juin 2014 (« Sabourin »).

[7] Vorstadt, Harvey, Nerdahl

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